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le nom de racine de disette ; les choux-chèvres, les choux-navets connus depuis peu sous le nom de choux de Sibérie ; les pois, les vesces, laspergule, les fèves, &c. enfin toutes les herbes quelconques que l’on sème pour en retirer, pendant un temps, la nourriture du bétail, & dont on enfouit ensuite les feuilles, les tiges & les racines. Tel est en général la base de toute espèce de prairie artificielle. Comme chacun de ces mots est traité séparément dans ce Dictionnaire, on peut les y consulter.

Avant de terminer ce travail sur les prairies, il est important de faire connoître, en abrégé, un Mémoire sur un nouveau fourrage originaire d’Afrique, tiré de la Nouvelle Angleterre & des îles d’Amérique, par M. de l’Etang, communiqué par M. Thouin, à la Société Royale d’Agriculture, & inséré dans la Collection de ses Mémoires, pag. 90 du trimestre d’automne, année 1786.

» Les Anglois, y est-il dit, qui ont sans cesse les yeux ouverts sur tout ce qui a rapport au commerce, ont je crois, découvert ce fourrage en Afrique, & l’ont transporté sur le champ dans leurs possessions d’Amérique, où ils le cultivent avec le plus grand avantage, sous le nom de Guinea-grass, c’est-à-dire, herbe de Guinée.

» Cette plante inconnue au célèbre Linné, n’est que depuis dix ans au jardin du Roi, où elle fut présentée à M. d’Aubenton, par un curieux qui venoit d’Afrique ; elle fut placée dans la classe des graminées & dans le genre des panis, sous la dénomination de panicum altissimum, & M. Thouin, dont tout le monde çonnoìt le zèle pour l’avancement de la botanique, nous l’a heureusement conservée jusqu’à ce jour & dans toute sa fraîcheur ; puisque, malgré des neiges & des gelées assez fortes, elle étoit encore en état d’être laissé en pleine terre à la fin du mois de novembre ».

» Il paroit par les recherches que, j’ai faites, continue l’auteur, tant dans nos îles qu’à la Nouvelle-Angleterre, que c’est vers le commencement de ce siècle que cette plante précieuse a été transportée d’Afrique en Amérique par les anglois qui, ayant vu combien elle étoit utile dans son pays natal, n’eurent garde de la négliger ; mais il n’y a guère que 15 à 20 ans, que nos colons de l’îie de Saint-Domingue l’ont introduite dans leur île, en la tirant, les uns de la Jamaïque, & les autres de la Nouvelle-Angleterre, sous le nom d’herbe de Guinée, qu’elle porte encore aujourd’hui. Le besoin de fourrage fit sentir, pendant la guerre dernière, combien cette plante étoit précieuse. Plusieurs expériences faites dans différentes parties de l’île, & même dans les plus mauvais terrains, ont prouvé que l’herbe de Guinée, six mois après avoir été semée, s’étoit déjà élevée jusqu’à la hauteur d’un homme, & étoit si serrée qu’à peine une volaille auroit pu passer dans le champ. Enfin cette culture est aujourd’hui presque universelle dans tous les environs du Cap ; ce qui n’étonnera pas ceux qui sauront qu’un des plus grands avantages de cette herbe, qui ne demande, une fois semée, aucune espèce de soin, est de croître généralement par-tout dans les terrains les plus ingrats. Sa fécondité & sa manière de se propager par ses graines extrêmement fines & abondantes, est même telle, que, la