Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1789, tome 8.djvu/577

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nivelée au râteau ou à la herse, il faut visiter la pépinière. Si les racines ont cinq à six pouces de long, & si elles sont de la grosseur d’un fort tuyau de plume à écrire, on les tire de terre ; on ne retranche rien de leurs fibres, mais on coupe le haut de leurs feuilles ; prenant ensuite un plantoir de bois, on fait dans la terre des trous profonds de quatre pouces & demi à cinq pouces ; on fait ces trous en ligne droite & en échiquier, à dix-huit pouces de distance l’un de l’autre : on met une racine dans chaque trou, on l’y place de manière qu’on puisse en découvrir le collet hors de terre, environ de six lignes. Précaution aisée, mais très-essentielle, & sans laquelle on ne réussit jamais bien ; ces plantes reprennent racine en vingt-quatre heures, & un homme un peu exercé, peut en planter dix-huit cents à deux mille dans sa journée.


§ V.

Première récolte des feuilles, & culture des racines.

À la fin de juin ou dans les premiers jours de juillet, quand les feuilles extérieures ont acquis environ un pied de long, on en fait une première récolte, en les cassant autour & tout près de la racine ; on appuie à cet effet le pouce en dedans & à la naissance de la feuille ; il faut avoir l’attention de ne pas laisser de chicot : on ne doit cueillir que les feuilles qui penchent vers la terre, & toujours ménager celles du cœur de la plante, elles se reproduisent & croissent plus vite. Aussitôt après cette première récolte, on donne avec le hoyau un labour ou binage aux racines. On doit, en donnant cette seconde façon, éloigner du haut de la racine, avec une spatule de bois, la superficie de la terre fraîchement remuée, de manière que chaque racine soit déchaussée d’un pouce & demi ou deux pouces ; elles paroissent alors plantées dans un petit bassin de neuf à dix pouces de diamètre ; un enfant peut aisément faire cette opération. Dans les terres légères, il suffit de sarcler les mauvaises herbes, & de bien faire le travail avec la spatule ; après cette seconde opération essentielle, on n’a plus qu’à récolter : c’est le moment où les racines commencent à s’étendre & à croître d’une manière étonnante ; elles ne veulent point de plantes parasites pour voisines ; il leur faut de l’air & de la place pour pouvoir s’abandonner à toute leur végétation.


§. VI.

Produit des Feuilles.

Dans une bonne terre, on peut effeuiller ces racines tous les douze à quinze jours.

Les bœufs, les vaches, les moutons dévorent ces feuilles, s’en nourrissent, & s’en engraissent facilement ; on les leur donne entières, comme elles arrivent des champs ; toutes les volailles de basse-cour en mangent coupées & hachées menu, mêlées avec du son ; les chevaux même s’en accommodent très-bien, on peut leur donner les racines mélangées avec de la paille hachée ; les cochons en mangent très-volontiers.