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terrain. Il faut bien le labourer ; plus la terre est ameublie & plus elle est favorable à la végétation du ris. On la fume bien. Si la terre est froide, on sent qu’il faut lui donner les fumiers les plus chauds ; si au contraire elle est d’un tempérament chaud & sec, il faut l’amender avec des fumiers humides, comme avec le fumier de vache… On divise la rizière par espaces quarrés, à peu près comme les espaces des jardins. On environne chaque espace d’une espèce de petite levée ou chaussée de terre relevée d’un pied trois pouces de hauteur & épaisse de deux pieds. Cette chaussée retient l’eau dans la rizière : il faut qu’elle puisse soutenir un homme qui passe & repasse dessus pour l’arrosement ; il faut enfin que ces compartimens soient arrosés si commodément que l’eau y découle avec facilité & y séjourne sans s’extravaser par aucune crevasse. Il faut enfin qu’elle y soit retenue comme dans un petit étang. On voit bien par là qu’il n’y a que les plaines qui soient susceptibles déformer des rizières. On fait couler l’eau d’un espace à l’autre par de petites ouvertures, ou ce que l’on appelle clefs pour les étangs, de sorte que l’on peut y faire couler l’eau & l’en ôter à volonté.

IV. De la saison propre à semer le ris. Après avoir bien labouré, ameubli & même pulvérisé la terre, l’avoir amendée avec du fumier analogue à son tempérament, on choisit le commencement du mois d’avril pour l’ensemencer. On sème le ris à peu près aussi épais que le froment, & on le recouvre avec la charrue ou avec la herse.

On observera sur-tout de faire tremper la semence dans l’eau pendant l’espace d’un jour ou deux, & de la répandre toute humide sur le terrain, quand elle commenceroit même à germer. Elle n’en pousse que plus facilement & plus vite. On couvre le terroir d’eau à la hauteur de deux doigts, & on tient l’eau continuellement à cette hauteur. On voit dans peu de tems le ris pousser hors de la superficie de l’eau, & quelque fois si vigoureusement qu’il se verseroit si on n’y apportoit remède.

Lorsque l’on s’aperçoit de cet inconvénient, on n’a qu’à lui ôter l’eau pendant quelques jours, jusqu’à ce que, faute d’humidité, il prenne plus de consistance, plus de nerf, & se remette en bon état. Car comme l’eau, ainsi qu’on l’a déja dit, est l’aliment de cette semence, lorsqu’on l’en prive, on empêche ses tiges de filer. Ainsi, lorsqu’après l’en avoir privé, on voit qu’il est fané par le soleil, on lui redonne l’eau, mais en plus grande quantité qu’auparavant, c’est-à-dire, au moins de quatre à cinq doigts, pour proportionner toujours l’eau au degré de l’accroissement de la plante. On l’augmente lorsque l’on s’aperçoit qu’elle fleurit & que par conséquent elle va commencer à grainer, & on ne l’en ôte plus, tant pour favoriser son accroissement que pour le préserver de la nielle, qui ne manqueroit point de l’attaquer si on le privoit d’eau. On fait enfin écouler les eaux peu de jours avant la récolte.

V. Des soins à donner à une Rizière. Si le ris produit beaucoup, il demande en revanche beaucoup d’attentions journalières. Le propriétaire qui entreprend cette culture, doit aller visiter tous les jours tous les endroits de la rizière, examiner les chaussées, les aqueducs, les écluses, &c. afin que