Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1789, tome 8.djvu/770

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ment, s’il est possible de boiser agréablement & utilement les grandes routes, sans nuire aux propriétés des riverains.

Trois objets sont à examiner dans cette question. Le premier, comment doit-on planter ? Le second, par qui doit être faite la plantation ? Le troisième, comment pourvoir à la plantation ?

I. Comment doit-on planter ? Je suppose avec raison que la loi qui prescrit les plantations forcées dans les champs, est supprimée ; elle est vexatoire, & presque par-tout sans effet. Il y a deux moyens de remplacer ces plantations ; 1°. en les-faisant dans les fossés, 2°. sur le bord même de la berme du chemin. Ces deux expédiens trouveront des contradicteurs ; mais je les prie, de be pas juger d’après l’habitude, & de peser les raisons qui vont leur être présentées.,

De la plantation sur le bord des bermes. J’ai dit que la largeur des chemins devoit être de 36 pieds, savoir 24 pavés ou empierrés, & six de chaque côté, formant la berme. C’est sur cette berme, & à deux pieds du bord du fossé, que l’arbre doit être planté. Il restera donc de chaque côté quatre pieds de largeur de terrain destinés aux piétons ou aux cavaliers, & sans ornière : si on suppose que l’arbre acquiert un jour deux pieds de diamètre, la berme aura encore une largeur suffisante & proportionnée à sa destination. L’espace de deux pieds & encore mieux de trois, servira à placer de distance en distance les caissons, c’est-à-dire les matériaux destinés à l’entretien de la voie publique ; & ces caissons supposés de trois pieds de largeur sur une longueur indéterminée, garantirons les arbres du frottement des charrettes, si, toutefois, il prenoit fantaisie aux conducteurs de faire passer une de leurs roues sur la berme. De petits fossés de trois pieds, placés de distance en distance, produiroient au besoin le même effet.

Tout arbre que l’on plantera sur la berme doit nécessairement réussir. Si le chemin est tracé dans une plaine, il a fallu nécessairement le rehausser, & établir une espèce de chaussée. On a commencé à tirer la terre du fossé & à la jeter sur les bords du nouveau chemin, & le milieu a été garni par l’empierrement. On a donc ajouté un ou deux pieds de terre végétale sur la couche qui existoit déja, & personne n’ignore les bons effets produits par la terre rapportée aux pieds des arbres. Ils réussiront donc, s’ils ont été plantés avec de bonnes racines, & s’ils ont été plantés avec soin. L’exemple en est frappant aux abords de la ville de Lyon, sur les routes de Paris, du Bourbonnois, du Forés, &c. Cette méthode commence heureusement à être adoptée dans quelques provinces. Il ne s’agit plus que d’y limiter la largeur excessive, des routes.

Les bords sont la partie qui se dégrade le plus facilement, parce que étant la partie la plus basse, l’eau y coule avec rapidité, & détruit les angles ; mais chaque année on récure les fossés, & la terre que l’on en retire est jetée de nouveau sur le bord du chemin : cette terre préparée par les pluies, enrichie par les substances animales & végétales qui s’y sont pourries, devient un engrais excellent pour les arbres, sur-tout