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c’est peut-être à leur absence qu’est due la durée des bois employés à la construction des maisons de ces pays froid ?

Dans une grande partie de la Franche-Comte & de la Suisse, toutes les maisons, excepté celles des gens riches, sont couvertes avec des lattes de sapin, que dans le pays on nomme ancelles.

Dans plusieurs endroits où l’on prépare les cuirs, on emploie le sapin à la place du tan ; mais il est moins bon, moins actif que celui du chêne. L’abondance du premier & la disette du second forcent à son usage. Souvent on mêle à l’écorce du sapin celle du noisetier.

Les vrais sapins fournissent la térébenthine, & cette résine devient une récolte pour certains cantons. Je n’ai jamais vu faire cette opération & ne puis par conséquent la décrire. Je vais copier mot pour mot ce que M. Duhamel en dit dans son Traité des arbres.

« Les sapins, proprement dits, qui ont les feuilles blanchâtres par-dessous, & d’un verd clair par-dessus, & que l’on nomme sapins à feuilles d’if, sont les seuls qui fournissent cette résine liquide & transparente, connue sous le nom de térébenthine. Toutes les années, vers le mois d’août, des paysans Italiens, voisins des Alpes, font une tournée dans les cantons de la Suisse où les sapins abondent, pour y ramasser la térébenthine, Ces paysans ont des cornets de fer blanc qui se terminent en pointe aiguë, & une bouteille de la même matière pendue à leur ceinture. Ceux qui tirent la térébenthine des sapins qui croissent sur les montagnes des environs de la grande Chartreuse, se servent de cornes de bœuf qui se terminent en pointe ainsi que les cornets de fer blanc. C’est une chose curieuse de voir ces paysans monter jusqu’à la cime des plus hauts sapins, au moyen de leurs patins armés de crampons qui entrent dans l’écorce des arbres dont ils embrassent le tronc avec leurs deux jambes & un de leur bras, pendant que de l’autre ils se servent de leur cornet pour crever de petites tumeurs ou des vessies que l’on aperçoit sur l’écorce des sapins proprement dits. Lorsque leur cornet est rempli de cette térébenthine claire & coulante, ils la versent dans la bouteille qui tient à leur ceinture, & les bouteilles se vident ensuite dans des outres ou peaux de bouc qui servent à la transporter dans les lieux où ils savent en avoir le débit le plus avantageux.

» Comme il arrive souvent qu’il tombe dans les cornets des feuilles de sapin, des fragmens d’écorce & des lichens (consultez ce mot) qui salissent la térébenthine, ils la purifient par une filtration, avant de la mettre dans des outres ; pour cet effet ils lèvent un morceau d’écorce à un épicia, ils en font une espèce d’entonnoir, dont ils garnissent le bout le plus étroit avec des pousses du même arbre ; ensuite ils remplissent cet entonnoir de la térébenthine qu’ils ont ramassée elle s’écoule peu à peu & les ordures restent engagées dans la garniture. Voilà la seule préparation que l’on donne à cette résine liquide avant de l’exposer en vente.

» Il n’y a que les sapins propre-