Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1796, tome 9.djvu/253

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on unit en quantité suffisante on sel quelconque, & sur-tout un sel alkali, les deux substances s’unissent par l’intermède de ce troisième ; & c’est aussi ce qui arrive dans l’opération présente. Il résulte de cet agrégat un corps savonneux, soluble dans l’eau. L’expérience du savon dont se servent les blanchisseuses, est la preuve de la composition de cet agrégat & de sa solubilité dans l’eau. La terre calcaire, ou humus ou terre végétale par excellence, divisée en ses parties à l’infini, s’unit à cette mixtion. & elle est tenue en dissolution dans le fluide par l’air fixe ; tout comme ce même air fixe tient-en dissolution les substances terreuses & salines, qui donnent de la saveur aux eaux minérales. Ces eaux sont à la vue aussi limpides, aussi claires, que l’eau des plus pures fontaines ; mais, si on en laisse échapper l’air fixe, elles se troublent, & déposant, plus ou moins, suivant leur nature, un dépôt au fond du vase. C’étoit donc l’air fixe qui tenoit ces matières en dissolution ; l’air fixe échappé, elles ont repris leurs premières propriétés ; elles n’ont plus été solubles ; enfin elles ont précipité un sédiment. Il en est ainsi dans la végétation : l’eau dissout les principes ; l’air fixe y contribue & maintient leur dissolution ; enfin la sève préparée & attirée par les racines, elle monte dans les tiges, dans les branches, s’élabore dans les différentes filières par où elle passe ; mais, à mesure que l’air fixe se combine dans la plante, l’humus ou sédiment forme sa charpente & constitue sa solidité. Plus le bois de l’arbre est compact, dur & pesant, plus il renferme d’air fixe & de molécules terreuses. Les bois porreux & légers donnent à l’analyse moins de cendres & moins d’air-fixe.

Il résulte de ce qui vient d’être dit, & j’oserois dire, presque démontré, que la sève est une dans son ensemble, à quelques légères modifications près, dues aux circonstances ou aux localités ; mais, si la sève est une, pourquoi chaque plante fournit-elle des sels différens ? pourquoi la saveur qu’elle imprime sur la langue, n’est-elle pas la même ? C’est un problème à résoudre.

Nous ne nous sommes occupés jusqu’à présent que des seuls matériaux de la sève, dont il falloir prouver l’existence. Après les avoir examinés séparément, & fixé le mode de leurs combinaisons, voyons actuellement par que] travail cette eau savonneuse se métamorphose en sève propre & particulière à chaque plante.

Si on examine à part chaque espèce de semences, on lui trouve une saveur & une odeur qui lui sont personnelles, s’il est permis de s’exprimer ainsi. Si on soumet les semences à la forte pression, on retire presque de toutes les espèces une huile ou aromatique ou sans odeur. Si on les soumet à l’analyse par l’eau, en suivant les procédés de Lagaraye, on en retire les sels propres. Si on opère par la distillation, on obtient de l’eau plus ou moins sapide, plus ou moins odorante, de l’huile grasse, de l’huile essentielle (consultez ce mot), du sel, de l’air & de la terre, parce que ces principes sont retenus ou condensés dans les vaisseaux distillatoires : si, au contraire, on les analyse par l’incinération, les principes volatilisés par la chaleur, s’échappent, la cendre seule reste, & elle contient un sel plus abondant, si l’incinération a été