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lente & ce qu’on nomme étouffée, à la manière de Tachenius. Ce sel n’est point le véritable sel contenu auparavant dans la semence ; c’est un sel alcali presque pur, développé par l’action du feu. Le plâtre ou gypse offre la preuve de ce changement. Tout le monde sait qu’il est, dans son état naturel, une terre calcaire saturée d’acide ; mais, après son incinération, après avoir perdu par le feu son eau de cristallisation, on n’y trouve plus qu’un sel alcali ; son sel acide a disparu. Avant la cuisson du plâtre, cette terre calcaire, saturée d’acide, ne faisoit aucune effervescence, lorsqu’on jetoit par-dessus du vinaigre, de l’esprit de nitre étendu dans l’eau, &c. Après l’opération du feu, tous les acides y excitent la plus vive effervescence. Le changement opéré par le feu, sur le plâtre, est l’image des combinaisons qui ont lieu dans la végétation sur la sève, sur cette eau savonneuse, qui tient en dissolution plusieurs principes ; de ces combinaisons résultent d’autres principes mélangés, des saveurs propres, des huiles & des sels particuliers.

La première métamorphose commence dans la germination de la graine. Mâchez un ou plusieurs grains de froment, (consultez ce mot relativement à son développement) vous ne leur trouvez qu’une saveur fade ; que ce grain germe, mâchez-le de nouveau ; le germe ou radicule aura une saveur un peu piquante, & la matière contenue sous son écorce, produira sur le palais une saveur douce & véritablement sucrée. La substance que s’est appropriée le germe, a déjà éprouvé une combinaison, puisqu’elle n’est plus strictement la même que la substance sucrée contenue dans le-grain. Cette nouvelle combinaison qui n’a eu lieu que par la fermentation causée dans le grain, par la seule absorption de l’humidité, & même, si l’on veut de l’eau la plus pure, se continuera pendant toute la végétation de la plante ; mais elle s’y modifiera encore sous de nouveaux rapports, puisque jusqu’à ce moment, le grain germé n’a travaillé que sur son propre fonds, augmenté par un peu d’humidité ; mais dès que la radicule pompera l’eau savonneuse qui constitue la sève, aussi-tôt de nouvelles combinaisons auront lieu dans les principes constituans du grain, & dans ceux de la sève que sa radicule aspire. En effet, ceux de la radicule, sont à ceux de la sève, ce que le levain est à la pâte. Ils produiront l’assimilation, l’appropriation, & opéreront la métamorphose des principes séveux, en principes propres & identiques a la plante. La nature suit la même marche plus ou moins modifiée, dans la germination de toutes les graines, & dans leur appropriation de la sève. C’est ce levain placé dans le germe, & à l’orifice des racines & des plus petites racines fibreuses, qui opère cette admirable métamorphose. Ce levain est encore aux plantes, ce que la salive (eau savonneuse) est dans la bouche de l’homme. Les glandes salivaires en fournissent sans cesse ; sans cesse elle se mêle dans la trituration des alimens, & les prépare à la digestion, qui doit avoir lieu dans l’estomac. Sans la salive, on ne digéreroit pas, ou du moins on digéreroit très-mal. C’est elle qui aide la première conversion des alimens en chyle, &c. Le même mécanisme a lieu à l’orifice des racines.