Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1796, tome 9.djvu/402

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cotier est au déclin du solstice[1], depuis la fin de juin jusqu’à la fin de juillet, après la grande pousse des arbres qui se fait en juin… Pour les poiriers, pommiers & pruniers, dont la pousse est plus tardive, ce n’est qu’au déclin de la canicule, depuis la fin de juillet jusqu’à la fin d’août, n’étant plus à craindre après ce renouvellement de sève, qu’on appelle la sève d’août, occasionnée par la grande chaleur de la canicule[2], que les arbres poussent de nouveaux bourgeons, qui ne seroient même que de faux bourgeons tendres, blanchâtres, nullement propres à donner du bois, ni du fruit… Si vous retranchez trop jeunes les sorties, les nouveaux canaux où l’abondance de la sève s’est extravasée, ne pouvant plus être contenue dans les principales branches, la sève perce de nouveau, et forme de nouveaux bourgeons multipliés, par-tout où elle trouve jour ; elle s’épuise enfin à ce jeu répété ; & toutes les petites plaies de ces nouveaux rejetons que vous avez retranchés, et dont les pores sont plus ouverts, prenant plus d’air, sèchent & fatiguent vos arbres. La sève, au contraire, a-t-elle jeté tout son feu, a-t-elle poussé au-dehors tout ce qu’elle contenoit de superflu, elle s’arrête ; vous retranchez alors entièrement ces bourgeons, c’est-à-dire, toutes les petites branches qui sont sur le devant & sur le derrière de l’arbre, celles enfin qui sont confuses & absolument inutiles. Il n’en repousse plus d’autres, ces mêmes bourgeons étant alors plus murs, plus serrés, les pores moins ouverts, le retranchement que vous en faites, donne moins d’entrée à l’air, desséche & fatigue moins vos arbres. Les fruits, d’ailleurs encore tendres, ont besoin de cette couverture pendant un certain temps à l’abri des bourgeons, étant moins exposés aux ardeurs du soleil & à d’autres accidens ; ils se nourrissent & grossissent davantage, & se trouvant débarrassés à temps & à propos de ce bois inutile, avant de les palisser, ils s’accoutument insensiblement à l’air, & prennent une nouvelle croissance.

» Enfin, toutes vos branches à palisser étant plus corsées, ayant plus de longueur & de consistance, elles supportent mieux les attaches, elles ont plus de soutenance, & votre palissage est fait pour n’y plus revenir ; c’est diminuer l’ouvrage & gagner du temps : il faut donc sur cela ne pas céder aux mauvais exemples & ne jamais ébourgeonner avant le temps prescrit, si ce n’est dans des cas particuliers & extraordinaires, comme il arrive quand les fourmis ont attaqué un pêcher, qu’elles en ont crispé & recoquillé les bourgeons & les feuilles dont elles ont formé des paquets aux

  1. L’auteur parle pour le climat de Paris ; à mesure qu’on s’approche du midi, l’ébourgeonnement doit être plus rapproché.
  2. J’ai développé à l’article sève, les causes de cette seconde sève, & d’après quels principes elle s’exécute.