Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1796, tome 9.djvu/536

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dant l’hiver on craint l’effet des trop fortes gelées, on fera bien de couvrir les planches avec des nattes, avec des tassons, &c… À la fin de l’hiver on serfouit légèrement la superficie de la terre, & on ménage avec soin les bulbes, dans la crainte de les endommager… Elles peuvent rester ainsi en place pendant deux années consécutives, ayant soin de renouveller le terrain de la superficie.

Vers le mois d’août ou de septembre de cette seconde année, on enlève de terre ces bulbes ; on les replante tout de suite dans de nouvelles planches garnies de bon terreau. Elles peuvent encore y rester pendant deux années consécutives, sans les lever de terre. Dans ces nouvelles planches, elles seront plantées à trois pouces de profondeur, & à six pouces de distance…

Communément, après la quatrième année, la majorité des bulbes commence à fleurir, c’est pourquoi, après les avoir sorti de cette seconde pépinière, on les traite ensuite comme des oignons faits. On ne peut pas juger sainement de la valeur de la plante par l’inspection de la première & même de la seconde fleur ; c’est pourquoi on ne doit commencer le triage des bonnes, mauvaises ou médiocres, qu’après avoir étudié la troisième fleur, mais à la huitième année, à dater de celle du semis, on sait positivement ce que l’on possède. C’est par de tels soins multipliés & continuels, que les Hollandois sont parvenus à se procurer les belles tulipes qu’ils vendent chèrement aux curieux qui ont porté la manie jusqu’à leur payer cent ducats un seul oignon.

Lorsque la fleur est fanée, il faut se hâter de la couper, dans la crainte d’épuiser ou affoiblir l’oignon ; alors les feuilles ne tardent pas à se dessécher. Lorsqu’elles le sont, on commence à creuser la planche à une de ses extrémités, & à six pouces de profondeur, de manière que la tranchée est à-peu-près de trois pouces au-dessous de l’oignon ; en continuant de creuser ainsi d’un bout à l’autre de la planche, on ne craint pas de blesser l’oignon ; il vient de lui-même à la main, & on n’oublie pas le plus petit cayeux. Après les avoir sortis de terre, on les nettoye de leurs anciennes enveloppes ; on les étend ensuite sur des claies, sur des planches de sapin, & non sur le carreau ou sur la pierre ; chaque oignon doit être séparé de l’oignon son voisin. Ces petites attentions ne sont point idéales ; si on les néglige, si on amoncelle les oignons, la fermentation s’établit, ou ils moisissent, ou le chancre les gagne. On guérit le chancre, en supprimant toute la partie attaquée, & en recouvrant, pour quelques jours seulement, & avec du sable très-sec, l’oignon dans son entier.


TULIPIER ou LAURIER TULIPIER. Von-Linné le classe dans la polyandrie-polygamie, & il l’a nommé successivement Tulipifera Liliodendron, ou Liliodendron Tulipifera. Comme je n’ai jamais suivi la culture de cet arbre magnifique, qui résiste, en pleine terre, à la rigueur de nos hivers, & que l’en commence singulièrement à multiplier en France, je crois devoir en parler dans le cours de cet ouvrage. Ne pouvant pas instruire les autres