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On multiplie cette espèce au moyen de ses graines qu’on apporte d’Amérique. On peut les répandre dans des pots & caisses remplis d’une terre légère de jardin potager, on sur une planche en pleine terre. Celles des pots peuvent être placées sur une couche de chaleur modérée, pour hâter leur accroissement & rendre les plantes plus fortes avant l’hiver ; mais il faut avoir soin que les vitrages soient à l’abri du soleil chaque jour, & que la terre des pots soit souvent arrosée ; car ces semences ne lèveroient pas sans humidité. On doit cependant leur donner de l’eau avec prudence pour ne pas les faire pourrir ; quand les plantes paroissent, on doit les tenir constamment à l’ombre pendant la chaleur du jour, & leur donner journellement de l’ombre pour les empêcher de filer. À mesure que la saison avance, on les endurcit par degrés, en les accoutumant à supporter l’air ouvert, & on les arrose souvent sans cependant leur donner trop d’eau à la fois.

Comme les jeunes plantes continuent souvent à croître tard en été, si les gelées se font sentir de bonne heure en automne, leurs sommets sont souvent détruits, & même elles périssent jusqu’au bas, ou seulement sur une longueur considérable. Pour éviter ces accidens, il faut les réserver des premières gelées qui sont toujours plus funestes que les plus grands froids de l’hiver, parce qu’alors leurs branches sont plus dures : il sera donc nécessaire de les mettre durant le premier hiver sous un chassis commun ou sous des cerceaux couverts de nattes, & de les exposer en plein air dans les temps doux.

Au printemps suivant, & immédiatement avant que les plantes commencent à pousser, il faut les transplanter sur des planches de pépinières, précisément dans un lieu abrité & ou elles ne soient pas trop exposées au soleil.

Le sol de ces planches doit être une marne molle, pas trop ferme, ni trop légère, bien travaillée, & exactement ameublie : il faut avoir grand soin de ne pas déchirer les racines des plantes en les enlevant, car elles sont fort tendres, & de les replanter le plutôt possible. On peut les placer en rang, éloignées d’un pied & à six pouces entre elles dans les rangs. Cet espace sera suffisant, parce qu’elles ne doivent pas rester long-temps en pépinière ; d’ailleurs, en les rapprochant ainsi, il sera plus aisé de les abriter en été & en hiver. Lorsqu’elles sont ainsi disposées, on empêchera la terre de se dessécher trop vite, en la couvrant avec du tan pourri, ou avec de la mousse. On évitera par-là de les arroser aussi souvent qu’on seroit forcé de le faire, si la terre étoit exposée au soleil & à l’air. On aura soin aussi de les tenir nettes des mauvaises herbes. Si la fin de l’été est humide, les plantes croîtront tard en automne, & leurs tendres sommets seront sujets à être détruits par les premières gelées. Dans ce cas, il sera nécessaire de les couvrir avec des nattes pour les en garantir.

Si ces plantes font un grand progrès dans le premier été, on pourra les transplanter encore une fois au printemps suivant, une partie à demeure, & les autres dans une pépinière où on les laissera deux à trois ans pour leur faire acquérir de la