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souvent ; on évite par ce moyen que les vaches n’en mangent une trop grande quantité, ou qu’elles ne s’en dégoûtent & ne la rejettent, après l’avoir altérée avec leur haleine. En ne mangeant que peu d’alimens à la fois, elles les broyent mieux, elles ruminent davantage, & la santé & l’embonpoint sont toujours la suite de la perfection de cette opération.

Il est fort peu de plantes qu’on ne puisse ainsi donner en vert, à l’étable. Les plus ordinaires sont la luzerne, le trèfle, le sain-foin, le colsat, la pimprenelle, les carottes, les raves, les navets, les choux, la sauve ou faux sénevé, les laitues, les pommes de terre, les topinambours, le jong marin ou genêt épineux, le persil, les boutons & les feuilles d’ormes, de frêne, d’érable, de saule, de peuplier, la trainasse, les vesces, les cosses de pois, des fèves ; enfin, toutes ou presque toutes les plantes des jardins, ainsi que celles qu’on trouve dans les champs après la moisson.

Lorsqu’on donne des racines aux vaches, il est important de les leur hacher, autrement on les exposeroit à être suffoquées, ce qui n’arrive que trop souvent.

L’expérience a appris que les racines sont plus nourrissantes, & qu’elles donnent plus de lait, lorsqu’on les fait cuire à moitié.

Il est essentiel d’être très-réservé sur la luzerne, outre qu’elle est très échauffante, & que le lait qu’elle fournit a peu de qualité, elle donne aux vaches qui en ont mangé avec excès, des indigestions dont elles périssent souvent.

On doit user de la même réserve pour les pousses d’ormes, de frênes & autres arbres ; prises avec excès, elles occasionnent le pissement de sang, des diarrhées dysentériques, & d’autres maladies graves & souvent mortelles.

On ne doit jamais donner aux vaches de verdure échauffée ; elle est la cause assez ordinaire d’un grand nombre de maladies.

On attendra pour cueillir l’herbe destinée à nourrir les vaches, que le soleil ait abattu la rosée ; il seroit très-dangereux de la leur présenter lorsqu’elle en est encore couverte.

On ne donnera aux vaches, autant qu’on le pourra, que de l’herbe qui ait acquis la maturité, c’est-à dire, dont les fleurs commencent à s’épanouir ; plus tard, elle est trop mûre, & ses tiges sont dures ; plutôt, elle manque de suc, nourrit moins, & est plus sujette à fermenter dans l’estomac des animaux qui s’en nourrissent.

Lorsqu’on laisse les vaches prendre elles-mêmes leur nourriture dans les champs, on doit avoir grand soin de ne les faire sortir que lorsque la rosée sera dissipée, par les raisons qui ont été déja indiquées. Si la pâture est peu abondante, on les y laisse en liberté ; si au contraire, elle l’étoit beaucoup, comme les luzernes, les trèfles, les sain-foins, les pimprenelles, & les autres prairies artificielles, on attache les vaches à une corde fixée à un piquet planté dans le champ, & on ne leur abandonne que la quantité qu’on veut leur faire dépouiller. Lorsqu’elles l’ont consommée, on les laisse quelque temps sans les changer, pour leur donner celui de ruminer ; après quoi, on retire le piquet qu’on replace un peu plus loin. Ce déplace-