Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1796, tome 9.djvu/705

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

duites dans l’aîr par le bruit du tonnerre, &c.

Avant que l’orage se décide, le temps est bas, lourd & pesant ; la chaleur si suffocante qu’on peut à peine respirer ; la vapeur semble accabler la nature, on ne ressent pas le vent le plus léger, on ne voit pas une seule feuille agitée ; les substances animales se putréfient promptement, enfin la touffe se manifeste plus ou moins en raison de l’air atmosphérique, & surtout de celui de l’atelier. Les vers peuvent donc éprouver une asphixie dans ces momens critiques. Le tonnerre & les éclairs, indiquent le mal, mais ne font pas le mal. Il faut donc employer les moyens que j’ai indiqués en parlant de la touffe. Il en résultera de bons effets.

CHAPITRE X.

Du temps où il faut décoconner ou déramer.

Voici l’époque où l’éducateur va jouir du fruit de son travail, de ses peines &, de ses soins, par une récolte de cocons. S’il a gouverné ses vers à soie, en observateur qui cherche à s’instruire, il jugera de même si les procédés employés sont couronnés par un succès certain. Enfin les personnes qui pensent qu’il faut mettre beaucoup de graine, sans considérer si elles pourront loger tous les vers qui en proviendront, sauront ce qu’une once a produit, & ce qu’elle produiroit en observant ce que j’ai dit à ce sujet.

Déramer, ou décoconner, c’est enlever la bruyère des tablettes, dont on s’étoit servi pour faire des cabanes, afin d’en séparer les cocons. Quelle est la véritable époque de cette opération ? aussitôt que le ver à soie a jeté sa dernière matière soyeuse ou son dernier fil. Mais comme il travaille dans l’intérieur de son cocon, nous ne pouvons pas connoître l’instant où il finit son ouvrage. D’après plusieurs expériences, on s’est convaincu, en ouvrant des cocons, à différentes époques, que le ver à soie étoit quatre jours à filer son cocon. À la fin de ce terme, on peut donc le détacher de la bruyere. Si tous les vers d’une même éducation montoient dans la même journée, à la cinquième on pourroit déramer. Il est à propos, lorsqu’on vend ses cocons, de ne pas les laisser dans la bruyère, plus long-temps qu’il n’est nécessaire pour leur perfection, parce qu’ils sèchent, & le poids diminue, ce qui est une perte pour le vendeur. Quant à la qualité de la soie, elle n’en est point altérée.

Mais quoique les vers soient bien gouvernés, il est très-difficile qu’ils marchent tous d’un pas égal. Dans la même éducation il y a toujours une différence de plusieurs heures dans les mues, ainsi que je l’ai observé. Cette même différence doit avoir lieu à la montée. Ainsi, quoiqu’il soit certain que le ver ne mette que quarre jours à faire son cocon, il ne faut pas rigoureusement déramer au cinquième ; d’ailleurs ils ne travaillent pas tous avec une activité égale ; les uns sont trois, les autres quatre, & peut-être cinq jours & plus à perfectionner leur ouvrage. Il est donc prudent d’attendre huit ou dix jours avant de déramer, en