Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1800, tome 10.djvu/107

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semée dans un pareil terrain, immédiatement après la moisson, ne résiste pas à la gelée. La récolte en est d’autant plus abondante, qu’il est de fait que, plus une plante emploie de temps en terre à parcourir les différens périodes de son accroissement, plus elle acquiert de vigueur, plus son produit est considérable. Les vrilles de vesces annonçant, comme on l’a dit plus haut, leur besoin de s’accrocher et de rencontrer des appuis, il est essentiel de joindre à la semence un dixième ou un douzième de seigle ou bien d’orge, ou d’avoine acclimatés aux saisons pendant lesquelles leur végétation doit avoir lieu. Le choix de l’une ou de l’autre est toujours commandé par l’exposition et la nature de la terre, cent vingt-cinq livres de semences de vesce suffisant communément pour couvrir un demi-hectare. Si on sème pendant l’automne, on ajoute aux cent vingt-cinq livres une huitième partie des graminées dont on vient de parler ; et quand on juge à propos d’attendre au printemps, le poids de celles-ci peut faire partie des cent vingt-cinq livres de vesce.

Le moment de récolter est, pour l’une et l’autre vesce, quand on la destine à n’être que fourrage, celui où la plus grande partie des siliques est seulement formée. Quant à celle dont on veut extraire la graine, soit pour semence, soit pour la nourriture des pigeons, ou pour être distribuée pendant l’hiver aux bêtes à laine, dans du son ou avec de l’avoine, il faut attendre que les cosses aient acquis la couleur brune, et ne rien négliger pour saisir le temps où le baromètre et les autres indications météorologiques peuvent faire espérer une suite de beaux jours. Moins la plante restera de temps à faner, moins il y aura de perte, meilleur sera le fourrage.

Le champ débarrassé (ce sera vers le commencement de messidor), donnez aussitôt un coup de charrue et semez dans les terres meubles des navets ou turneps ; dans celles qui auront un peu plus de ténacité, des choux-raves ou des choux-navets. Si le champ a été bien fumé, bien labouré, avant de recevoir la semence de vesce, si les navets ou choux-raves sont ensuite soignés, c’est-à-dire, éclaircis, sarclés et binés à temps ; non seulement la récolte des racines sera abondante ; mais, dès le printemps suivant, on les remplacera avantageusement, et sur un seul labour, par de l’orge ou de l’avoine dans laquelle on sèmera du trèfle. Celui-ci sera consommé sur pied l’année suivante par les bestiaux de la ferme ; mais il faut avoir l’attention de les cantonner et de les faire se succéder les uns aux autres dans l’ordre suivant : les cochons, les bœufs, les vaches, les chevaux, les bêtes à laines. Le cultivateur attentif n’oubliera pas sans doute qu’on ne peut prendre de trop grandes précautions pour introduire plus sûrement les bestiaux dans un champ de trèfle. On ne doit leur en permettre l’entrée, non-seulement qu’après l’entière dissipation de la rosée : mais il faut, avant de les y introduire, qu’ils