Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1800, tome 10.djvu/121

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treille, à quelque maturité qu’il parvienne, quelque flatteur qu’il soit au goût, ne produit une liqueur parfaitement vineuse. Si l’on persistoit à vouloir chercher les heureux résultats agricoles des Anglois dans une température plus égale que la nôtre, dans l’humidité dont leur atmosphère est sans cesse imprégnée, nous citerions pour toute réponse l’exemple de la plupart de nos départemens de l’Ouest, la ci-devant Bretagne entr’autres, qui, sous les rapports du sol et du climat, peut être assimilée à plusieurs comtés aujourd’hui très-fertiles de l’Angleterre, et qui ne peut leur être comparée sous ceux des produits agricoles.

Nous trouverons la source de cette prospérité, 1°. dans l’éducation très-soignée de ceux qui se destinent aux entreprises rurales de quelque importance. Un Gentelman farmer initie aux connoissances de son état ceux de ses enfans qui sont destinés à suivre la même carrière, comme, parmi nous, un négociant, un banquier, un armateur, prépare les siens, dès leur jeune âge, aux grandes spéculations commerciales. Placés ainsi de bonne heure au dessus de la routine et des préjugés, les cultivateurs se pénètrent aisément de la grande vérité qu’exprime Columelle quand il dit : bien misérable est le champ dont le propriétaire est obligé de recourir aux leçons de l’ouvrier qu’il salarie.

L’aisance dans la fortune, les moyens pécuniaires les laissent toujours à portée de faire avec une sorte de largesse, non-seulement les premières avances nécessaires dans une grande exploitation, mais encore les réparations annuelles et les prompts remplacemens que les circonstances exigent, ou que des événemens imprévus peuvent commander. Le propriétaire ne se contente pas d’encourager ses colons par des paroles, il les éclaire de ses lumières, il partage la gloire et les avantages des succès. La protection directe du gouvernement, l’estime de ses concitoyens, l’agrandissement de sa fortune deviennent l’inestimable récompense de ses soins et de ses travaux assidus. L’accroissement des richesses par l’agriculture est si rare en France, qu’on seroit tenté d’y regarder comme fabuleuses ou du moins comme exagérées les anecdotes anglaises de ce genre, si elles n’étoient appuyées de témoignages irrécusables. Peu après que les défrichemens du Norfolk eurent été commencés, on citoit un monsieur Marley de Barsham qui, par son industrie et ses procédés agricoles,

    M. William Spéechly, que sous la latitude d’Ely (52 degrés 20 minutes) les raisins mûrissoient quelquefois, et qu’alors les religieux en faisoient du vin, et que quelquefois aussi ils ne mûrissoient pas : dans ce dernier cas, on les convertissoit en verjus. Il en est de même aujourd’hui dans Derbyshire. Les treilles qui croissent le long des murailles exposées au Midi, produisent de très-bons raisins quand l’été est chaud ; si la saison est humide et froide, ils ne sont pas mangeables, A Treatise on the culture of the vine, etc., by William Speechly.