Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1800, tome 10.djvu/136

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imprimés et manuscrits de nos principales bibliothèques tous les renseignemens qu’il est possible de se procurer sur cette matière, et qui les a présentés avec tant d’art. Au surplus, si le tableau de la nomenclature que nous offrirons au lecteur laisse beaucoup à désirer quant à la forme, nous ne croyons pas du moins qu’il en soit ainsi pour le fond.

Tout annonce que les vignes se sont propagées parmi nous, à la seconde époque de leur plantation, en partant du Midi, du voisinage de Marseille ; cette culture suivit aussi-tôt deux directions, pour ainsi dire opposées l’une à l’autre ; savoir celle du Nord et celle du sud-ouest. La première pénétra par le Dauphiné sur les coteaux du Rhône, les bords de la Saône et toute cette fameuse côte, formée de monticules, qui traverse la Bourgogne du Midi au Nord : de-là elle s’étendit par le pays des Séquanois (la Franche-Comté), sur la rive gauche du Rhin, sur les coteaux de la Marne, de la Moselle et sur ceux qui bordent la Seille.

La seconde branche se dirigea par le sud-ouest vers le Languedoc, la Gascogne et la Guienne.

Il est vraisemblable que de ces deux branches principales naquirent des ramifications qui s’étendirent à l’intérieur, en raison de la situation topographique des différentes provinces et des relations qu’avoient entre eux ceux qui les habitoient. C’est ainsi sans doute que les Périgourdins, les Limosins, les Augoumoisins, les Saintongeois, les Rochelois et peut-être les Poitevins se procurèrent les plants de vigne et la culture déjà introduits dans la Guienne : que les habitans de l’Auvergne, du Bourbonnois, du Nivernois et du Berri reçurent les leurs du Lyonnois, pour les transmettre de même aux Tourangeaux, aux habitans du Blaisois et aux Angevins. Le Gatinois, l’Orléanois, l’Isle de France reçurent les leurs des vignobles qui servent de limites aux anciennes provinces de Bourgogne et de Champagne. Les plants furent communiqués et leur culture se propagea avec une rapidité qui semble inconcevable, quand on réfléchit avec combien de lenteur on parvient de nos jours à faire adopter les bons principes et les meilleurs procédés de culture. Il est vrai que dans ces tems reculés les grands propriétaires ne dédaignoient pas de diriger personnellement les exploitations rurales ; et il faut ajouter que les souverains eux-mêmes n’étoient pas étrangers aux détails de l’agriculture, cette belle science, dit Olivier de Serres, qui s’apprend en l’école de la nature qui est provignée par la nécessité et embellie par le seul regard de son doux et profitable fruit[1]. Les premiers ducs de Bourgogne firent faire beaucoup de plantations pour leur propre compte. On voit dans plusieurs de leurs anciennes ordonnances ; combien ils se flattoient d’être qua-

  1. Préface du Théâtre d’Agriculture.