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Des expériences et des faits tirés de la culture et de la végétation de la vigne, confirment cette théorie qui nous met elle-même à portée de remonter aux causes de certains effets très-simples, très naturels, et qui sont autant de phénomènes pour les cultivateurs qui ne se sont jamais livrés à l’étude de la géographie physique.

À Téhéran, où l’on est souvent forcé d’arroser la vigne pendant les grandes sécheresses de Fêté, comme nous l’avons déjà dit, on l’enterre vers la fin de l’automne pour la garantir des fortes gelées de l’hiver. Qui peut nécessiter des procédés si opposés, dans le même sol ? ou plutôt, comment à une telle latitude la température peut-elle éprouver des variations si extrêmes ?

Il est facile de répondre à cette question. Si les vents conducteurs des gelées et des frimas régnent dans ces contrées pendant plusieurs mois de l’hiver ; si la couche de terre végétative a beaucoup de liaison, si elle est glaiseuse et plus propre à maintenir les eaux, à les conserver, qu’à les laisser s’infiltrer, il est tout naturel que le froid y acquiert assez d’intensité pour produire des gelées d’autant plus sensibles et nuisibles à ces vignes, qu’elles jouissent pendant la plus grande partie de l’année d’une température très-chaude, le thermomètre y descendant rarement alors au dessous de 20 et 26 degrés.

Mais, ajoutera-t-on, si la terre végétative a tant de consistance, elle conserve l’humidité ; si elle conserve l’humidité, pourquoi ces arrosemens pendant l’été ?

Pourquoi ? Parce que cette couche de la superficie dans laquelle, en effet, l’argile se trouve dans une assez forte proportion avec les autres terres, n’a peut être pas un demi-mètre d’épaisseur ; qu’elle repose sur un banc de sable dont on ne connoît pas le diamètre, et que le dépôt d’eau se trouve placé à une telle profondeur, que ses émanations tendent inutilement à monter jusqu’aux racines des plantes ; parce qu’une couche de terre argileuse qui n’a qu’un demi mètre d’épaisseur, et qui est exposée à une chaleur adurante, comme celle de 26 degrés, a bientôt perdu par la vaporisation toute l’humidité dont elle étoit imprégnée, si les vapeurs souterraines ne peuvent parvenir à la renouveler proportionnément à la déperdition qui s’en fait. Elle arrive ainsi eu peu de tems à un état de siccité qui seroit mortel pour les plantes si l’art ne venoit à leur secours, s’il n’employoit, pour les conserver, le moyen des arrosemens.

Ce procédé d’enterrer ou de couvrir la vigne pour la préserver des gelées pendant l’hiver, n’est point inconnu dans notre climat ; il est en usage dans quelques cantons du Haut-Rhin, mais seulement dans les vignes de la plaine, et dans des terres assez compactes pour être propres à la reproduction des blés[1]. Cette couche de terre végétative a sans doute peu

  1. Ce procédé n’a lieu que sur les vignes de deux, trois ou quatre ans de