Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1800, tome 10.djvu/288

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la stérilité dans le terrain, et du rachitisme dans les plantes. Les tiges sont minces, à moitié déracinées, les sarmens frêles, courts et menus. Les fruits, qui y sont suspendus, sont plutôt des grappillons que des grappes ; et leurs feuilles sembleroient plutôt appartenir à l’érable commun, acer campestre, qu’à la vigne. Ce terrain est trop maigre ; la pente de la couche argileuse, suivant l’inclinaison de toutes les autres couches, a trop de rapidité pour transmettre de l’humidité aux racines ; elles ne trouvent donc là que la quantité essentielle de nourriture qu’il leur faut pour ne pas mourir ; et cela ne suffit pas. Ces hauteurs, exposées aux effets des orages violens, sont souvent battues par les vents, frappées par la grêle, et éprouvent, même à l’aspect du plein midi, des froids plus piquans et plus dangereux que si elles avoient l’exposition du nord.

Vers la base de la montagne, la vigne est sujette à des inconvéniens tout contraires et non moins fâcheux. L’atmosphère y est toujours humide ; les bonnes terres s’y sont amoncelées dans une proportion désastreuse pour cette plante, parce qu’elle s’y repaît d’une surabondance de nourriture qui fait tourner à bois tous ses produits, ou qui fait passer les raisins à la pourriture, avant qu’ils aient atteint l’époque de leur maturité.

Le milieu du coteau est donc la position par excellence. La vigne n’y trouve point de quoi satisfaire son intempérance naturelle ; elle n’y pâlit point non plus dans une disette absolue. Non seulement sa végétation s’y maintient dans les bornes que l’art tend à lui prescrire ; mais par l’action et la réaction des rayons du soleil, c’est-à-dire, par leur incidence et leur réflexion, le vin y acquiert des qualités qu’on ne trouve jamais dans celui qui est récolté aux deux autres extrémités. On observe que si le vin du bas de la montagne, qu’on nomme le clos Vougeot, vaut trois cents francs, les deux hectolitres, celui du milieu se vend neuf cents, et celui du haut, six cents seulement.

La nature des terres regardées comme les plus propres à la culture de la vigne, varie comme les climats dans lesquels cette culture est introduite : nous ne parlerons ici que des couches supérieures du sol, pour ne donner dans aucune conjecture hasardée. L’expérience démontre que, dans les départemens méridionaux, la vigne se plaît et prospère dans les terres volcaniques, dans les grès et dans les sables granitiques, mêlés de terre végétale et de quelques portions d’alumine. Vers le centre de la France, elle réussit dans les schistes ardoisés, et sur-tout dans les roches calcaires qui se délitent facilement au contact de l’air. Au nord, on préfère le sable gras, combiné avec la terre calcaire, mais par-tout on peut faire usage de la réunion presque monstrueuse des terres et des pierres de tous les genres, pourvu que cette masse soit très perméable à l’eau, et quelle retienne très-peu d’humidité. On regarde comme une qualité essentielle des bonnes terres à vigne,