Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1800, tome 10.djvu/369

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et constant. Le suc aigre ou acerbe qui se développe dans le raisin dès les premiers momens de sa formation, ne sauroit être convenablement élaboré dans le Nord : ce caractère primitif de verdeur existe encore lorsque le retour des frimats vient glacer les organes de la maturation.

Ainsi, dans le nord, le raisin, riche en principes de putréfaction, ne contient presqu’aucune élément de fermentation spiritueuse ; et le suc exprimé de ce fruit, venant à éprouver les phénomènes de la fermentation, produit une liqueur aigre dans laquelle il n’existe que la proportion rigoureusement nécessaire d’alkool, pour interrompre les mouvemens d’une fermentation putride.

La vigne, ainsi que toutes les autres productions de la nature, a des climats qui lui sont affectés : c’est entre le 40 et le 50e. degré de latitude, qu’on peut se promettre une culture avantageuse de cette production végétale. C’est aussi entre ces deux termes que se trouvent les vignobles les plus renommés et les pays les plus riches en vins, tels que l’Espagne, le Portugal, la France, l’Italie, l’Autriche, la Styrie, la Carinthie, la Hongrie, la Transylvanie et une partie de la Grèce.

Mais, de tous les pays, celui, sans doute, qui présente la situation la plus heureuse, c’est la France : nul autre n’offre une aussi grande étendue de vignobles, ni des expositions plus variées ; nul ne présente une aussi étonnante variété de température. On diroit que la nature a voulu verser sur le même sol toutes les richesses territoriales, toutes les facultés, tous les caractères, tous les tempéramens ; comme pour nous présenter dans le même tableau toutes ses productions. Depuis la rive du Rhin jusqu’au pied des Pyrénées, presque par-tout on cultive la vigne ; et nous trouvons, sur cette vaste étendue, les vins les plus agréables comme les plus spiritueux de l’Europe. Nous les y trouvons avec une telle profusion, que la population de la France ne sauroit suffire à leur consommation ; ce qui fournit des ressources infinies à notre commerce, et établit parmi nous un genre d’industrie très-précieux, la distillation et le commerce des eaux-de-vie.

D’un autre côté, l’énorme variété de vins que possède la France, établit, dans l’intérieur et au dehors, une circulation d’autant plus active, qu’il est plus facile au luxe et à l’aisance d’en réunir toutes les qualités.

Mais, quoique le climat frappe ses productions d’un caractère général et indélébile, il est des circonstances qui modifient et brident son action ; et ce n’est qu’en écartant avec soin ce qu’apporte chacune d’elles, qu’on peut parvenir à retrouver l’effet du climat dans toute sa pureté. C’est ainsi que, quelquefois, nous verrons, sous le même climat, se réunir les diverses qualités de vin, parce que le terrein, l’exposition, la culture modifient et masquent l’action immédiate de ce grand agent.

D’un autre côté, il est des plants