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II°. Influence de l’air dans la fermentation.

Nous avons vu dans l’article précédent qu’on peut modérer et retarder la fermentation en soustraisant le moût à l’action directe de l’air, et en le tenant exposé à une température froide. Quelques chimistes, d’après ces faits, ont regardé la fermentation comme ne pouvant avoir lieu que par l’action de l’air atmosphérique ; mais un examen plus attentif de tous les phénomènes qu’elle présente dans ses divers états, nous permettra d’accorder une juste valeur à toutes les opinions qui ont été émises à ce sujet.

Sans doute l’air est favorable à la fermentation : cette vérité nous est acquise par la réunion et l’accord de tous les faits connus. Car sans lui, sans son contact, le moût se conserve long-tems sans changement, sans altération. Mais il est également prouvé que, malgré que le moût, enfermé dans des vases bien clos, y subisse très-lentement ses phénomènes de fermentation, elle ne se termine pas moins à la longue ; et que le vin qui en est le produit n’en est que plus généreux. C’est là ce qui résulte des expériences de D. Gentil.

Si l’on délaye un peu de levure de bierre et de mêlasse dans l’eau, qu’on introduise ce mélange dans un flacon à bec recourbé, et qu’on fasse ouvrir le bec du flacon sous une cloche pleine d’eau et renversée sur la planchette de la cuve hydropneumatique, à la température de 12 à 15 degrés du thermomètre, j’ai constamment vu paroître les premiers phénomènes de la fermentation, quelques minutes après que l’appareil a été placé ; le vuide du flacon ne tarde pas à se remplir de bulles et d’écume ; il passe beaucoup d’acide carbonique sous la cloche, et ce mouvement ne s’apaise que lorsque la liqueur est devenue spiritueuse. Dans aucun cas je n’ai vu qu’il y eut absorption d’air atmosphérique.

Si, au lieu de donner une libre issue aux matières gazeuzes qui s’échappent par le travail de la fermentation, on s’oppose à leur dégagement en tenant la masse fermentante dans des vaisseaux clos, alors le mouvement se ralentit, et la fermentation ne se termine que péniblement et par un tems très-long.

Dans toutes les expériences que j’ai tentées sur la fermentation, je n’ai jamais vu que l’air fut absorbé. Il n’entre ni comme principe dans le produit, ni comme élément dans la décomposition il est chassé au-dehors des vaisseaux avec l’acide carbonique qui est le premier résultat de la fermentation.

L’air atmosphérique n’est donc pas nécessaire à la fermentation ; et, s’il paroît utile d’établir une libre communication entre le moût et l’atmosphère, c’est parce que les substances gazeuzes qui se forment dans la fermentation, peuvent alors s’échapper aisément en se mêlant ou se dissolvant dans l’air ambiant. Il suit encore de ce principe que, lorsque le moût sera