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Je me bornerai à citer aux cultivateurs de ces contrées, un témoin irrécusable, digne de foi, et qui, pendant quarante années, fut cultivateur, avec un succès reconnu, et avoué par tous les cultivateurs, ses voisins, dans un pays de grande culture ; c’est Cretté, (de Palluel).

Quand il avoit un cheval usé, il le mettoit à l’eau blanchie pendant quelques jours, le faisoit saigner selon son état et la cause de sa maladie, et ensuite le mettoit au verd. C’est lui qui, le premier, imagina de nourrir les chevaux de réforme avec de la chicorée sauvage. Cultivateur éclairé, il observa que cette plante seule opéroit un trop grand relâchement ; il en modéra les effets en y mêlant du foin ; bientôt après, il suppléa le foin, en semant avec la chicorée sauvage diverses graines de prairies artificielles ; il mélangea avec la chicorée sauvage quelques graines de trèfle, de luzerne, raigraw, et sur-tout de la grande pimprenelle : ainsi mélangée, la chicorée sauvage produisit les meilleurs effets.

J’ai vu chez lui, ainsi que plusieurs cultivateurs et amis de l’agriculture, des chevaux de sa poste de Saint-Denis qui, en arrivant à sa ferme de Dugni, ne laissoient que peu d’espoir sur leur rétablissement, et qui, après un mois de régime, n’étoient plus reconnaissables.

En sortant du lieu où ils a voient été mis au verd, il ne les renvoyoit pas de suite à la poste, mais à la charrue. Cette transition raisonnée prouve seule les connoissances de ce célèbre agronome. Puisse son exemple être utile au moins aux cultivateurs des pays à grande culture, qui auront des chevaux fatigués.

Les vaches, dans ces contrées, semblent plutôt y être entretenues pour y consommer du fourage et faire du fumier, que pour toute autre fin : on ne les y nourrit que de paille pendant au moins les trois quarts de l’année ; elles attirent peu l’attention du maître ; la maîtresse et les servantes seules les soignent exclusivement, et comme elles l’entendent, ou plutôt, d’après tous les usages anciens, en les accumulant en plus grand nombre possible, dans un petit espace, en laissant sous elle beaucoup de litière, (tandis qu’à côté les chevaux sont nettoyés tous les jours) et en laissant au plancher, et dans tous les coins se former d’immenses toiles d’araignées, pour ou contre lesquelles il existe un préjugé incroyable et absurde.

Dans quelques fermes, après la moisson, on envoie les vaches sur quelques chaumes ou regains, que souvent les bêtes à laines ont déjà déprimé : d’autres les mettent au verd dans l’écurie même, et c’est le plus grand nombre.

Le régime de ces vaches, pour le verd, exige beaucoup plus de soins que pour celles des autres pays : plus délicates, par le séjour continuel à l’écurie, accoutumées à de fortes rations, elles pourroient se trouver plus promptement affectées par les effets fâcheux du verd ; elles ne manqueroient pas d’en