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niéres sont des enfans gâtés et accoutumés aux soins ; ils sont rarement assez bien arrachés pour qu’il n’arrive pas aux uns ou aux autres des déchirures qui font languir l’arbre transplanté. En supposant qu’ils soient bien arrachés, le planteur n’a pas toujours le soin de rafraîchir et disposer les racines de la manière propre, et de disposer le sommet.

En plantant des sauvageons, au contraire, pris dans des bois ou forêts, sur un sol ingrat ou inculte, on est plus certain de la reprise ; soigné dans le terrain disposé, il développe une prompte végétation. On ne le greffe que quand il est bien repris ; n’ayant pas de déplacement à éprouver, il fournit aussitôt une abondante sève à la greffe.

Les arbres des pépinières en général, sont le produit des semis faits avec des pépins d’arbres déjà greffés, de génération en génération. Il semble qu’ils se ressentent plus des effets de la domesticité. Les sauvageons de bois, au contraire, ne sont venus que de pépins de fruits sauvages, dans lesquels la nature conserve encore tous les germes d’une grande croissance ; car si dans ses desseins, elle fait croître certains arbres pour donner des fruits, elle les fait croître aussi poux devenir grands et forts. C’est au surplus une observation généralement faite, que les arbres greffés sur place et sur sauvageons, viennent beaucoup plus gros que ceux des pépinières.

Si on a donc l’intention de former des vergers, il faut préférer les sauvageons ; si on ne veut avoir que des espaliers, il faut préférer les arbres des pépinières, autant pour le choix des fruits que pour les succès même de l’arbre : car j’ai vu souvent des sauvageons greffés pour espalier, trop s’emporter en sève, ne pas rapporter, et avoir besoin d’une main bien habile pour les mettre à fruit.

Je conseillerai encore à ceux qui voudront former des vergers, de tenir tout le terrain en état de labour, pendant au moins cinq à six années. Je n’ai pas besoin d’avertir que ce travail doit être fait avec une grande circonspection, et que le dessous des arbres doit être travaillé à main d’homme. On pourra semer quelques végétaux printaniers, pour dédommager des fruits. D’ailleurs la détriture des feuilles, la fraîcheur qu’elles concentreront, ne pourront que favoriser la végétation des arbres. Que ceux qui pourroient douter de la réalité des effets d’une telle pratique, examinent ou consultent ceux qui ont vu les noyers, pommiers, châtaigniers, mûriers, partout où on est en l’usage d’ensemencer les terres sur lesquelles ils croissent.

Quand les arbres du verger seront grands, quand ils auront plus de moyens par leur hauteur et leur ramification, de soutirer de l’atmosphère l’humide qui leur est propre, on pourra alors laisser le sol du verger se couvrir de gazon, et s’en servir pour faire paître quelques bestiaux.

Parmi les diverses plantes, cependant, qui pourroient former ce pâturage, je conseillerois d’en pros-