Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 11.djvu/120

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mencés, des chènevières, etc. La chasse à l’abreuvoir ne présenteroit aucun avantage dans un canton trop humide ou très-arrosé : on ne pourroit y multiplier assez les pièges, et les oiseaux trouveroient trop aisément à se satisfaire loin des lieux où le travail du chasseur auroit répandu la défiance parmi ces peuplades innocentes. Les grandes chaleurs de l’été doivent être aussi regardées comme la véritable époque de cette chasse : plus la campagne est sèche, plus on doit s’attendre à voir fréquenté par les oisillons le lieu propre à leur servir d’abreuvoir. Toutes les espèces des habitans ailés des bois s’y rendent alors en foule : c’est le moment de les y arrêter dans toutes sortes de pièges, et sur-tout ceux de ces oisillons dont la capture n’exige point une industrie particulière. On tend aux abreuvoirs les rets saillans, les gluaux, toutes les espèces de collets, simples ou à ressorts, tels que raquettes, ou sauterelles, rejets, etc.

Si l’abreuvoir est un ruisseau ou une source, et que l’on ne puisse en tendre toute l’étendue, on couvrira de chaumes ou d’herbages les endroits que l’on ne se sera pas réservés, afin de forcer les oiseaux à venir boire à la partie découverte. Cette première opération doit précéder de quelques jours celui que l’on aura déterminé pour exécuter sa tendue. Mais si l’on n’a qu’un de ces bassins qu’on appelle communément mares, marchats, etc., il faudra le garnir d’embûches tout à l’entour. Les rets saillans, que l’on peut tendre aux abreuvoirs, sont disposés comme ceux avec lesquels on chasse les alouettes à la ridée. J’ajouterai seulement que l’endroit où l’on place ce filet doit être nettoyé d’ordures, et de facile abord. (Voyez, pour le surplus, l’article Alouette.) Les mêmes filets peuvent servir pour les deux chasses. Cependant il seroit bon d’avoir, pour tendre l’abreuvoir, des nappes plus petites et dont les mailles fussent de moindre dimension ; neuf lignes suffisent à leur largeur. Quand on veut tendre un abreuvoir aux gluaux, on se munit d’un nombre de baguettes de saules propres à cet usage et proportionnées à l’étendue du ruisseau ou de la mare qu’on se propose de cerner. La longueur de ces baguettes est ordinairement d’un pied : on les englue jusqu’à deux pouces de leur extrémité pointue que l’on fiche en terre, et on les plante en rang à deux pouces de distance, et en les inclinant les unes sur les autres, ce qui forme une haie ou garniture dans laquelle s’arrêtent une multitude de petits oiseaux. L’auteur de l’Aviceptologie indique, au lieu de gluaux, l’usage de fils englués et tendus avec de petits piquets ; et il propose de prendre pour cela une certaine quantité d’aiguillées de bon fil de Bretagne, que l’on attache, après l’avoir garni de glu, à deux pouces de terre, au moyen de petits piquets plantés à deux pieds de distance.

Lorsqu’on se sert de gluaux, il faut que le chasseur, placé dans une loge d’observation bien couverte, ait l’attention de venir se saisir de sa proie à mesure qu’elle se prend, et rétablir les garnitures que dérangent les oiseaux en se débattant. Il ne suffit pas, au reste, pour faire bonne chasse de garnir de gluaux les bords de l’eau : avec cette seule précaution, beaucoup d’oiseaux, et sur-tout les gros, échapperoient. Mais comme tous en général aiment beaucoup à percher et à s’arrêter avant d’approcher de l’eau, on fiche en terre, à cinq ou six pieds des bords, plusieurs branches ou baguettes dont les plus hautes n’aient pas plus de cinq pieds. L’on y pratique une demi-douzaine d’entailles pour recevoir autant de gluaux, de manière à ce qu’ils soient inclinés les uns sur les autres : les baguettes elles-mêmes seront inclinées vers le bord de l’eau. Cette seconde garniture présente à peu près l’aspect d’une petite haie dépouillée de feuilles.

Si les bords de l’eau étoient environnés