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Deux personnes doivent prendre une grande serviette ou une nappe, la passer sous le viscère, et le supporter par le moyen de cette espèce de suspensoir ; si les angles de cette nappe sont attachés au col des aides, ils soutiendront cette partie plus solidement, et ils auront infiniment moins de peine.

Le viscère ainsi soutenu, l’artiste, ou la personne qui se propose d’opérer la réduction, fera placer la vache de manière que la croupe soit élevée, et le devant le plus bas possible ; la bête ainsi placée rend l’opération infiniment plus facile, parce qu’alors le propre poids du viscère tend à le remettre en place, et lorsqu’il est placé, il est plus assuré dans sa position : alors, l’artiste videra d’abord l’intestin rectum des matières qu’il pourroit contenir, et lavera la matrice avec de l’eau tiède. Cette ablution faite, il cherchera à détacher les cotylédons ; il agira toujours de préférence sur ceux, qui présenteront le moins de résistance ; il fera verser de l’eau tiède sur les parties qu’il tendra à séparer : quant à celles qui exigeront une certaine force pour les détacher, il soutiendra par sa main gauche la face interne de la matrice, pendant le temps qu’il agira de la droite pour tirer et pour séparer les cotylédons : il continuera ainsi toutes ces petites opérations, jusqu’à ce que le placenta soit entièrement détaché.

Il se fera apporter alors un second seau d’eau tiède, il y ajoutera une pinte d’eau-de-vie, il lavera et lotionnera très-exactement toute la surface du viscère avec cette liqueur, et il dirigera de préférence les ablutions sur les surfaces qu’occupoient les cotylédons. Il examinera s’il y a hémorragie : en ce cas, il cherchera à reconnoître le lieu précis d’où le sang sort ; il le lotionnera en particulier avec de l’eau-de-vie pure, ou avec un peu d’essence de térébenthine ; le sang étant arrêté, il procédera à la réduction du viscère, à moins que d’autres considérations ne l’arrêtent encore un moment.

Quelquefois une partie plus ou moins étendue de la surface de cette vaste poche se trouve plus tuméfiée que les autres ; cette tuméfaction peut être le produit de meurtrissures que la bête y a occasionnées en se frottant et en se débattant après le part ; elles peuvent encore dépendre d’un dépôt d’humeur charbonneuse. Cette circonstance n’est pas rare, lorsque le charbon règne sur les bêtes à cornes ; en ce cas, la tuméfaction est noirâtre, jaunâtre, ou blanchâtre ; cette dernière teinte ne s’observe guères que dans le charbon blanc.

Dans les uns et dans les autres de ces cas, il y auroit un danger imminent à renfermer la matrice, avant d’avoir dissipé et fait sortir le sang et les humeurs qui tuméfient ce viscère ; il ne faut point perdre de temps, s’armer d’un bistouri droit, scarifier la tuméfaction dans toute son étendue : ces incisions seront d’autant plus profondes, que la tuméfaction sera plus considérable, en prenant garde cependant de ne pas pénétrer au delà de la tunique charnue. Ces incisions faites, on lave et on lotionne pendant cinq à six minutes la partie avec l’essence de térébenthine, ou avec la teinture de quinquina, après quoi on procède à la réduction.

Pour l’opérer, on fera soulever, par le moyen des aides, à la faveur de la nappe, la matrice à la hauteur de la vulve ; alors l’artiste cherchera à pousser dans cette ouverture le fond de la grande corne : c’est toujours celle qui renfermoit le fœtus ; et comme il est obligé de faire beaucoup d’efforts, vu le poids énorme du viscère d’une part, et, de l’autre, la résistance des parties, il y auroit du danger à agir les doigts étant