Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 11.djvu/193

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Enfin, la petite culture française deviendra aussi florissante qu’elle l’étoit avant la révolution, lorsqu’elle ne voudra plus s’occuper que de la culture du lin, du chanvre, de la vigne, etc., et elle sera encore la source inépuisable de beaucoup de matières premières nécessaires à l’aliment du commerce, des manufactures et des arts.

En Angleterre, au contraire, l’agriculture est à peu près indifférente à ses habitans, sous le rapport de la production des céréales ; car ils ont toujours la facilité de s’approvisionner en grains sur les marchés étrangers : aussi leur culture ne fait-elle pas l’objet principal de son agriculture. D’ailleurs, le peu de surface de l’Angleterre, comparée à celle de la France, la foiblesse de sa population, la rigueur de sa température, ne lui permettent pas de donner à son agriculture toute l’étendue que présente l’agriculture française, et elle y est bornée, pour ainsi dire, à l’éducation et à l’engraissement des bestiaux. Dans la position de l’Angleterre, la profession du fermier doit y être dédaignée par les hommes intelligens, parce que l’agriculture ne peut pas leur offrir des profits aussi considérables que les spéculations du commerce et les travaux des manufactures et des autres arts. L’agriculture doit donc y être plus négligée qu’en France, où la profession de cultivateur est assez lucrative pour être recherchée, et être embrassée en concurrence avec les autres arts ; et si quelques comtés de l’Angleterre présentent une culture perfectionnée, et parfaitement adaptée à l’objet principal de l’agriculture anglaise, c’est qu’elle y est pratiquée par des propriétaires riches, pour lesquels elle est un amusement, et qui dès-lors ne calculent pas le bénéfice effectif qu’ils en retirent.

L’agriculture française doit donc tendre toujours à son perfectionnement, puisqu’elle présente autant d’avantages à ses nombreux habitans ; et l’agriculture anglaise doit, si l’on peut s’exprimer ainsi, rester stationnaire, puisque cet art n’est pas absolument nécessaire à la prospérité de l’Angleterre, et qu’il y est en général exercé par les hommes les moins intelligens des trois royaumes.

Ainsi, si nous n’avons point été assez tranchans pour décerner à l’agriculture pratique française la supériorité sur l’agriculture pratique anglaise, on ne pourra pas du moins nous taxer d’exagération dans le jugement que nous en avons porté.

Troisième Partie. — État de l’agriculture économique française, comparé avec celui de l’agriculture économique anglaise. Le tableau de cette partie de l’agriculture présente encore un beaucoup plus grand nombre d’objets en France qu’en Angleterre, et celle différence est due aux mêmes causes que nous avons assignées à celle qui existe entre l’agriculture pratique française et l’agriculture pratique anglaise. En France, ce tableau comprend, 1°. la manière de conserver les récoltes ; 2°. la fabrication du vin, du cidre, du poiré et de la bière, et la conservation de ces différentes boissons ; 3°. la fabrication des eaux-de-vie et de l’esprit ardent ; 4°. celle des huiles d’olives, de noix, de faînes, d’amandes, de noisettes, d’œillette, de navette, de colzat, de pavot, de cameline, de lin et de chènevis ; 5°. la fabrication des beurres ; 6°. celle des fromages de Brie, de Neufchâlel, de Maroilles, du Mont-d’Or, de Sassenage, etc. ; 7°. la préparation du lin, du chanvre, et même des orties, pour les usages des manufactures, des arts et du commerce ; 8°. l’éducation des abeilles, et les moyens de récolter le miel et de fabriquer la cire ; 9°. l’éducation des vers à soie ; 10°. la préparation de la coque de pastel, de la soude et du