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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 11.djvu/235

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de la ressemblance que les rangées d’herbes ou de tiges de grains coupées présentent avec les ondes formées par les eaux. Voyez Prairie. (S.)


ANDOUILLERS, (Vénerie.) Voy. Cors. (S.)


ANGUILLE, Murœna anguilla L. (Addition à l’article de l’Anguille, tome 1er. page 547.) Rozier pensoit que cet animal n’est pas un poisson ; une pareille erreur a lieu d’étonner dans un homme aussi instruit que l’auteur dont nous continuons l’ouvrage. L’on ne peut douter en effet que l’anguille ne soit un vrai poisson ; elle a tous les caractères des animaux de cette classe.

Ce seroit un travail fort inutile que de compléter le tableau des erreurs qui ont été débitées au sujet de la propagation des anguilles. Il suffit de dire qu’il est à présent constaté que ces poissons s’accouplent de la même manière que les couleuvres, et que les femelles font des œufs qui croissent et éclosent presque toujours dans leur ventre ; en sorte que les anguilles sont vivipares de même que les vipères. Elles sont fécondes dès leur douzième année ; leur croissance se faisant très-lentement, et jusqu’à la quatre-vingt-quatorzième année, elles peuvent produire jusqu’à la centième, et peut-être au delà ; ce fait, bien reconnu par des observations exactes, explique la grande quantité d’anguilles qui se trouvent dans les eaux qui leur conviennent.

C’est dans la vase où elles s’enfoncent que les anguilles se tiennent pendant la journée, ou dans des trous qu’elles se creusent, soit avec leur tête, soit avec leur queue. Ces trous ont assez ordinairement deux ouvertures opposées, et l’on en rencontre de spacieux dans lesquels plusieurs anguilles se logent ensemble. Elles quittent néanmoins leurs retraites, même vers le milieu du jour, lorsque la chaleur est extrême, ou que l’eau, dans laquelle elles vivent, commence à se corrompre ; elles s’approchent alors de la surface, et y demeurent immobiles et cachées sous des touffes de plantes aquatiques. Ces poissons possèdent la faculté singulière de sortir de l’eau, de s’en éloigner à des distances assez considérables, en rampant sur la terre sèche, comme les couleuvres, pour chercher les vers de terre et quelques végétaux qui leur plaisent, ou pour y trouver des eaux qui leur conviennent mieux que celles qu’ils quittent. Ce n’est guères que pendant la nuit qu’ils exécutent ces excursions sur un élément qui paroit devoir leur être étranger et funeste : aussi l’organisation particulière des ouïes des anguilles leur permet-elle de rester pendant un temps assez long hors de l’eau sans périr. On en a vu passer des mois et même des années entières au fond des étangs ou des rivières desséchés ; et ces anguilles cachées, et si long-temps privées d’eau, servent à repeupler de leur espèce les étangs qui ont été péchés. Dans les marchés des grandes villes de la Chine, les anguilles sont exposées en vente toutes vivantes dans du sable, tandis que les autres poissons sont tenus dans des vases remplis d’eau.

Il faut s’opposer à la trop grande multiplication des anguilles dans les étangs ou l’on veut entretenir l’abondance des autres poissons ; leur voracité mettroit un obstacle à la propagation d’espèces non moins utiles. Elles ne peuvent néanmoins dévorer que de petits poissons, à cause du peu d’ouverture de leur bouche. Au reste, on peut transporter les anguilles dans de l’eau, de l’herbe ou des joncs, sans leur faire courir aucun danger, d’une eau limpide ou tempérée, dans une autre bourbeuse ou froide. Cependant lorsque ces changemens trop brusques ont lieu pendant des chaleurs