Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 11.djvu/259

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

on arrose par irrigation les cressonnières, et les planches destinées à la culture des plantes de marais ; enfin, on arrose de cette manière, sur les côtes de Barbarie, les plantations d’orangers, de dattiers, et de presque tous les arbres fruitiers.

Arrosement par submersion. Cet arrosement est le plus convenable aux climats chauds, et presque le seul qui y soit en usage. Dans les pays tempérés, et particulièrement dans le midi de la France et de l’Europe, on l’emploie avec le plus grand succès, pendant l’été, pour toutes les espèces de cultures. Son usage, plus répandu dans les pays septentrionaux, sur-tout pour les prairies naturelles ou artificielles, augmenteroit les produits de l’agriculture, et par conséquent la richesse des États.

L’utilité de cette espèce d’arrosement est généralement reconnue ; les produits qu’elle donne, sur-tout en fourrages tirés des prairies artificielles, sont au moins du double de ce que peut produire une prairie de même nature, abandonnée aux eaux pluviales. Il n’est pas rare de faire dix bonnes coupes ou fauchaisons de luzernes, par an, dans les départemens méridionaux, sur une luzernière arrosée par irrigation, tandis qu’on en fait à peine trois sur celle qui n’est arrosée que par les eaux du ciel.

Mais, par la raison que la végétation est plus rapide et plus abondante, il se fait aussi une plus grande déperdition d’humus, ce qui nécessite une plus grande quantité d’engrais pour le remplacer et soutenir la vigueur des cultures. Cette augmentation de dépense, qui est peu considérable, est très-avantageusement couverte par l’abondance des produits.

il faut convenir cependant que tous les engrais employés à cette culture ne tournent pas au profit des plantes, et qu’une partie, délayée par les eaux, est entraînée par elles à une profondeur en terre qui la rend inaccessible aux racines des plantes, et que la couche supérieure seroit bientôt appauvrie, si l’on n’augmentoit pas la quantité des engrais ; mais, comme c’est avec des prairies que l’on obtient des fourrages, que les bestiaux fournissent les engrais, et que les engrais produisent des récoltes abondantes, il est économique de faire les premières dépenses, pour obtenir des résultats aussi avantageux.

Arrosement par nappes d’eau. L’arrosement par nappes d’eau est peu connu, et je ne l’ai vu pratiqué que dans un très-petit canton de l’Italie, aux environs de Lodi. Cette espèce d’irrigation exige des dispositions particulières dans la préparation du terrain, et dans la construction du canal d’arrosement.

On donne au canal six lignes de pente environ par toise, de sa partie supérieure à sa partie inférieure. Il est nivelé exactement dans la direction de sa pente. Son élévation est au dessus du terrain d’environ la moitié de sa profondeur. Le bord du canal opposé à la pièce de terre arrosable est plus haut de six pouces que celui qui est extérieur au champ. Une vanne ferme exactement son lit, à l’endroit où il dépasse la longueur de la pièce, et où il la quitte pour entrer sur le terrain voisin,

Au bas de cette même pièce, se trouve un petit canal servant à l’écoulement des eaux surabondantes ; il est construit comme le précédent, mais enfoncé de toute son épaisseur dans le terrain, et son bord extérieur est plus élevé de six pouces, que le niveau du sol de la pièce dans sa partie basse.

Lorsqu’on veut arroser les pièces de terre ainsi disposées, on fait arriver les eaux dans le canal supérieur, après en avoir fermé la vanne de l’extrémité : il se remplit bientôt, et les eaux arrivant toujours, elles s’échappent par le bord le