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fait rechercher ce gibier. Il est moins fort dans les jeunes bécasses dont la chair est aussi plus blanche et plus tendre. Toutes s’apprêtent, dans nos cuisines, sans être vidées, et leurs entrailles, avec ce qu’elles contiennent, font leur meilleur assaisonnement.

Les chasseurs distinguent deux races dans cette espèce : l’une beaucoup plus grosse, dont les pieds sont d’un gris teint de rose, et les couleurs du plumage plus rembrunies ; l’autre plus petite, et qui a les pieds de couleur bleue.

Ces oiseaux commencent à paroître dans les premiers jours d’octobre. Leur arrivée avance ou retarde de quelques jours, selon les vents et l’état de l’atmosphère, à l’entrée de l’automne. Les vents du levant et du nord-est sont ceux qui en amènent le plus, sur-tout lorsqu’ils sont accompagnés de brouillards. Elles arrivent ordinairement la nuit, et quelquefois de jour, quand le temps est sombre, presque toujours en troupes, quoique le contraire ait été dit et répété. Les chasseurs distinguent trois époques de leur passage, et fixent la première à la Saint-Michel, (29 septembre) la seconde à la Saint-André, (30 novembre) et la troisième à la Saint-Thomas (21 décembre.) Le mois de novembre, au reste, paroît être le moment de leur plus forte arrivée ; et la pleine lune de ce mois est nommée, parmi les chasseurs, la lune des bécasses.

C’est aussi le temps où elles ont pris de la chair, et où leur chasse commence à être plus avantageuse. Vers la fin de février, elles entrent en amour, perdent leur embonpoint, et bientôt après, partent pour regagner les lieux froids et les montagnes pour y faire leur couvée, La femelle pose son nid à terre, et le façonne négligemment avec des feuilles, des herbes, et des brins de bois. Ses œufs, au nombre de quatre ou cinq, ont à peu près la grosseur de ceux du pigeon commun, et des ondes noirâtres sur un fond gris roussâtre. Ces œufs passent pour un manger très-délicat. Les petits se mettent à courir autour du nid dès qu’ils sont éclos. Dans les momens de danger, le père et la mère se sauvent, emportant un de leurs petits qui se tient cramponné sur leur dos.

Il reste rarement quelques couples de bécasses dans les pays de plaines, et elles y deviennent d’une maigreur extrême.

La saison des amours et de l’éducation des petits est la seule où les bécasses fassent entendre des cris, auxquels la différence des affections fait prendre des tons différens. Tantôt ces cris passent du grave à l’aigu ; tantôt ils deviennent une sorte de croassement ; tantôt, enfin, ils ne sont plus qu’un murmure grave, un grondement.

Lorsque ces oiseaux arrivent, ils se jettent d’abord indifféremment dans tous les endroits fourrés, dans les haies, les bruyères et les broussailles ; bientôt ils choisissent de préférence, pour leur asile habituel, les taillis de neuf à dix ans, et les bois voisins de quelques mares, étangs, ou eaux courantes.

La bécasse cherche, dans le bois, sa nourriture sous les feuilles qui couvrent la terre ; elle les écarte avec son bec, pour trouver les insectes qui s’y cachent. À la fin du jour, elle part pour s’approcher des lieux humides. L’eau lui est nécessaire pour laver son bec et ses pieds ; et les terres molles des prés, des environs des marais, du fond des vallons, etc., l’invitent encore a véroter, ou à chercher des vers pendant la nuit : au jour, elle regagne ses bois.

Chasse de la bécasse. Les habitudes et les besoins de la bécasse servent de guide au chasseur, soit pour la tirer au fusil, soit pour lui tendre diverses sortes de pièges. La stupidité de cet oiseau rend sa chasse très-facile ; il ne