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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 11.djvu/343

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presque également dans toutes les espèces de terrains ; et même les premières végétations sont souvent plus fortes dans les mauvais terrains que dans les bons principalement dans les années chaudes et humides.

Mais, à compter de cette époque, l’allongement annuel des branches verticales des taillis, que nous nommons pousses annuelles, présente bientôt de grandes différences dans ces différens terrains.

Dans les mauvais, ces pousses diminuent bientôt de longueur, à mesure que les taillis avancent en âge, tandis que, dans les bons terrains, elles restent long-temps de la même longueur.

Par exemple, nous avons observé que la pousse annuelle des taillis de douze à quinze ans, croissant dans de mauvais terrains, n’est plus que de deux à six lignes, tandis que, dans les bons terrains, elle est encore, au même âge, de douze à vingt-quatre pouces.

De quinze à vingt-cinq ans, la pousse annuelle des taillis, croissant dans de mauvais terrains, n’est plus que de la hauteur du bourgeon, quelquefois même la cime des taillis commence à se couronner ; mais leur tige grossit encore : elle ne gagne plus rien en hauteur ; mais elle produit un bois de chauffage plus gros, plus pesant, plus durable au feu, enfin d’une meilleure qualité que celui qu’on retireroit de ces mêmes taillis coupés dans un âge moins avancé.

L’âge de vingt-cinq ans est donc celui de la maturité des bois croissant dans les terrains les plus mauvais, puisque c’est à cet âge qu’ils cessent d’y prendre de la hauteur.

La cessation de l’allongement des pousses annuelles d’un bois est donc le signe caractéristique et invariable de sa maturité.

C’est par des observations à peu près semblables que nous avons déterminé l’âge de maturité des bois croissant dans les autres espèces de terrains.

Pour y parvenir, nous avons observé les pousses annuelles du chêne dans ces différens terrains : nous avons déjà donné la raison de cette préférence. C’est d’ailleurs l’essence la plus précieuse par son utilité, et c’est celle qui, à quelques exceptions près, vient le mieux dans les terrains les plus mauvais, et où très souvent elle peut seule prospérer ; enfin, c’est l’essence dont les pousses annuelles sont les plus régulières, parce que le développement de ses bourgeons n a lieu que lorsque la saison est déjà avancée. Au défaut du chêne, on peut consulter les pousses annuelles du hêtre ; à son défaut, celles du charme ou du châtaignier, etc.

Cela posé, nous divisons donc les bois de la France en cinq classes, dont chacune est déterminée par la nature du terrain, manifestée par la longueur de leurs pousses annuelles sur ces différens terrains à un âge commun.

Dans ce classement, nous ne comprenons pas les arbres résineux et les arbres utiles plantés isolément, parce qu’on est dans l’usage de les jardiner ; non plus que les futaies pleines, qui feront l’objet d’une discussion particulière.

Dans la première classe, nous plaçons tous les taillis qui, de quinze à vingt ans, ne présentent que six à neuf pieds de hauteur, et dont les pousses annuelles ne s’allongent plus. Ce sont les bois croissant dans les terrains les plus mauvais.

Dans la seconde classe, ceux qui, à vingt-cinq ans, n’ont qu’une hauteur de neuf à quinze pieds. Dans cette espèce de terrain, les taillis ne prennent plus de hauteur, dès qu’ils ont atteint l’âge de vingt-cinq à trente ans.

Ce sont les bois croissant dans des terrains un peu moins mauvais que ceux de la première classe.