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Ces éclaircissemens, loin d’être onéreux, seront profitables au propriétaire ; car, si le premier ne lui présente pas un grand avantage, son produit excédera toujours les frais qu’il aura occasionnés, et les trois autres seront de véritables coupes.

Il faut cependant avoir l’attention de ne pas forcer les premiers éclaircissemens : on risqueroit de ne plus retrouver les distances dans lesquelles il faut faire le dernier ; et d’ailleurs, en établissant d’abord de trop grands vides dans nos futaies, on empècheroit les tiges des arbres réservés de prendre de l’élévation.

Ces réserves seront choisies, comme pour les futaies sur taillis, parmi les essences les meilleures et les arbres les plus beaux, les plus sains, et les plus vigoureux.

Ces futaies pleines éclaircies seront aménagées à deux cent vingt-cinq ans, ainsi que nous l’avons annoncé.

Cela posé, examinons l’effet que les éclaircissemens doivent produire sur leur végétation.

Il est reconnu que les chênes et les hêtres, croissant dans des terrains de cinquième classe, augmentent annuellement le diamètre de leur tige d’environ trois lignes, jusqu’à l’âge de cent soixante quinze ans. Au dessus de cet âge, jusqu’à deux cent vingt-cinq, cette augmentation diminue progressivement de largeur.

Cette augmentation annuelle dans la grosseur des arbres est plus forte, et conséquemment plus sensible encore, lorsqu’ils sont isolés et exposés à tous les engrais météoriques, que lorsqu’ils sont pressés les uns contre les autres, comme dans les futaies pleines.

Aussi, il faut beaucoup plus de temps aux arbres des futaies pour acquérir la même grosseur, qu’à ceux situés isolément dans un terrain égal en qualité, où ils trouvent une nourriture abondante, qui ne leur est pas disputée, et où ils peuvent profiter en entier de tous le» engrais météoriques.

L’effet des éclaircissemens dans nos futaies sera donc, en introduisant dans leur intérieur un air plus libre, et en les débarrassant des arbres les plus voisins qui partageoient leur nourriture, de les faire participer au prompt accroissement des mêmes arbres isolés, et conséquemment d’abréger le temps qu’ils auroient mis à acquérir une grosseur convenable, sans trop nuire à l’élévation de leur tige.

Ainsi, à cent vingt ans, les arbres de nos futaies éclaircies pourront déjà présenter une grosseur de quatre à six pieds de tour ; à cent cinquante ans, de cinq à neuf pieds ; à deux cent vingt-cinq ans, de huit à douze pieds de tour ; et leur tige pourra acquérir encore une hauteur de trente à soixante-dix pieds.

D’un autre côté, ces arbres étant choisis à chaque éclaircissement parmi les plus beaux, les plus sains et les plus vigoureux, il s’en trouvera un bien petit nombre de gâtés, lors de leur coupe, et alors nos futaies pleines éclaircies offriront à la marine, aux constructions civiles, et aux autres besoins de la société, des pièces de bois des plus grandes dimensions, de la boissellerie, du sciage de Hollande, etc.

Si, maintenant, nous les comparons avec les futaies proposées par M. Duhamel, tout l’avantage paroît être de notre côté.

En effet, 1°. nous ne prescrivons pas de planter nos futaies pleines, mais de les choisir dans les bois de la cinquième classe. Dès lors leur succès est assuré, tandis que celui des futaies plantées de M. Duhamel est incertain.

2°. Les tiges de nos futaies éclaircies auront, à la vérité, moins d’élévation que dans les futaies ordinaires, mais elles y seront plus droites et moins ondoyantes. Elles aauront un peu plus de tête, mais