Aller au contenu

Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 11.djvu/431

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sont les animaux les plus jeunes les plus forts ; et la mort est d’autant plus prompte qu’ils sont plus vigoureux. Pour l’ordinaire, on ne voit le charbon intérieur bien caractérisé que par l’ouverture des cadavres : le sang est noir et charbonné dans les gros vaisseaux, surtout dans les grosses artères ; les poumons sont gorgés d’un sang noir et épais qu’on trouve aussi épanché quelquefois en grande quantité dans la poitrine ; la plèvre, le médiastin, le péricarde sont gorgés de sang ; il y a des tumeurs noires sur le mésentère, dans l’épaisseur de la rate, du foie, du pancréas ; des ecchymoses dans le cerveau, au poumon, sur le cœur, on aux parois intérieures des ventricules de ce dernier organe.

Il est important d’observer un symptôme qui précède toute espèce de charbon, soit extérieur, soit intérieur : c’est le hérissement et le changement de teinte du poil ; il est sec et rude, ainsi que la peau, qui ne fournit aucune matière transpiratoire. Cette altération des poils s’étend depuis le milieu du dos jusqu’au commencement de la croupe, et comprend les lianes des deux côtés.

L’épine, en cet endroit, est tellement sensible, que la bête fléchit presque jusqu’à terre, quand on la presse avec la main, ou bien cette partie est d’une roideur, d’une inflexibilité étranges.

On peut juger par ces symptômes que les animaux ne tarderont pas à être affectés.

Causes du charbon tant intérieur qu’extérieure. Les tumeurs charbonneuses, et particulièrement le charbon à la langue, sont habituelles ou enzootiques dans les terrains bas, marécageux, surtout dans les années où des brouillards épais produisent la rouille des feins et des pailles ; la maladie suit la direction qu’on remarque à ces brouillards. On voit encore le glossanlhrax dans certains endroits des pâturages où des insectes de diverses espèces se sont établis, où quelques uns ont déposé de nombreux filamens, et où ils ont obtenu une multiplication rapide. Il est quelquefois l’effet de l’irritation produite par les barbes des épis de l’orge des murs, de la folle avoine, etc.

Le charbon à la langue, ainsi que les autres tumeurs charbonneuses, viennent cependant ainsi dans les autres endroits, par les causes générales des charbons.

Ces causes sont, lorsqu’au printemps et dans une partie de l’été une sécheresse opiniâtre brûle les pâturages et cause la disette d’alimens, dessèche les marres, les ruisseaux, les rivières ; on ne peut plus alors abreuver les animaux que d’eaux bourbeuses et croupissantes, que d’eaux de puits froides et crues, ou bien il faut en aller chercher à plusieurs lieues. Ou tâche d’abord de suppléer au défaut d’alimens verts, par tout ce qu’on peut en avoir de secs ; puis on fait manger du trèfle en vert pour toute nourriture, dès qu’on peut en faucher ; on donne des foins et des grains, dès qu’on peut les récolter, et avant qu’ils aient jeté leur feu.

Les animaux sont mal nourris ; cependant les travaux sont ordinairement plus pénibles dans cette saison, et la sécheresse en augmente les dangers. L’intensité de ces causes est encore plus active dans les endroits élevés, et dans ceux où l’évaporation de l’eau a mis a sec des bourbiers, des étangs, des marais qui deviennent infects.

Les longues sécheresses sont le plus souvent terminées par des pluies abondantes et subites, ou elles surviennent quelquefois pendant la récolte des foins qu’elles lavent, et dont elles enlèvent les sucs nourriciers. Les eaux débordées, non seulement macèrent les plantes, mais les couvrent d’un limon qui s’y attache, et reste encore quand on donne le fourrage aux animaux.