Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 11.djvu/432

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Quelques foins mis en tas étant imparfaitement secs, se moisissent ; les insectes nombreux, dont la sécheresse avoit favorisé la multiplication, s’y pourrissent et ajoutent à leurs mauvaises qualités. Les pluies qui surviennent avant la récolte des fromens, des avoines, etc., versent surtout les blés, principalement si elles sont accompagnées de vent ; outre que le grain s’altère par cette circonstance, les pailles se détériorent à la manière des foins, et peuvent donner lieu aux mêmes accidens.

Après la récolte et les pluies, il pousse en abondance des herbes dans les lieux submergés ; les animaux ayant souffert de la disette, les cultivateurs s’empressent de les mettre au pâturage ; et c’est alors que les vapeurs qui s’élèvent de la terre, et qu’on désigne sous le nom de miasmes des marais, jointes au changement brusque opéré dans l’atmosphère et dans les alimens, produisent, dans l’économie animale, après divers changemens successifs, les altérations qui caractérisent le charbon.

Si ces causes n’ont pas, dans cette année, toute l’activité que nous avons supposée, la maladie est quelquefois moins répandue, ou bien elle ne se manifeste que trois, six ou huit mois après, lorsqu’on a fait consommer par les animaux les fourrages macérés, poudreux, moins capables de nourrir que de nuire, par le peu de bonté, et par toutes leurs mauvaises qualités. L’intensité du mal est bien plus grande encore, si de nouvelles intempéries viennent à l’augmenter.

Cette réunion de circonstances est une véritable calamité : le charbon attaque tout un pays, devient épizootique ; la perte d’un nombre prodigieux d’animaux fait la désolation sur-tout des campagnes.

Ces causes atteignent, par leur influence, les diverses espèces d’animaux, et quelquefois l’homme lui-même ; la contagion propage ce fléau ; la cohabitation d’animaux sains avec des animaux de même espèce sur-tout, et le contact d’une partie saine avec une partie charbonnée, suffisent pour communiquer la maladie.

En 1784, à Montauban, il périt des chiens qui n’avoient fait que lécher le sang, d’animaux charbonneux saignés pour les préserver ; il périt aussi des poules qui avoient seulement avalé des graviers teints du même sang.

Ailleurs, des mèges sont morts du charbon, parce qu’ils avoient vidé le rectum en fouillant avec la main ; des vétérinaires, parce qu’ils avoient touché du sang d’animaux charbonneux à quelques plaies ou à quelques boutons qu’ils avoient au bras, ou ailleurs : un berger mourut au bout de huit heures, parce qu’il avoit simplement ôté le cuir d’un œuf mort de la maladie ; d’autres ont été attaqués de gonflemens dangereux à diverses parties, pour avoir été atteints par du sang d’animaux charbonneux, ou pour s’être blessés avec l’instrument qui leur avoit servi à opérer, et ne sont parvenus à se sauver que par le traitement le plus méthodique et le mieux suivi.

Moyens curatifs du charbon. D’abord, nous allons exposer le traitement du charbon extérieur, en le rapportant à plusieurs indications.

Dès le début, on doit, 1°. tâcher de prolonger la vie, 2°. favoriser l’éruption de la tumeur et son développement, en excitant l’énergie vitale ; ou en la modérant, suivant qu’il est nécessaire.

On consultera d’abord le pouls ; s’il est plein et dur, si l’animal est vif, une pléthore sanguine pourroit conduire la maladie à une terminaison brusque et fâcheuse ; pour l’éviter, on fera, à la jugulaire, une saignée suffisante, et on la renouvellera, s’il en est besoin. (Voyez Saignée.)

Si au contraire le pouls est petit,