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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 11.djvu/473

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au bout de quelques minutes, la liqueur passe très-claire.

Ce filtre ainsi disposé peut encore être employé à filtrer beaucoup d’autres liqueurs, sur-tout celles qui sont aqueuses, et ne contiennent pas de potasse ou de soude en dissolution ; car, pour peu qu’elles fussent alcalines, le filtre seroit bientôt détruit, et la liqueur filtrée n’auroit pas les qualités requises.

La toile et le papier servent ordinairement pour filtrer les liqueurs alcalines, et ils réussissent très-bien, sur-tout lorsque ces liqueurs ne sont pas trop concentrées.

Quant au coton cardé, on le réserve pour filtrer les fluides regardés comme précieux, soit parce qu’on a de la peine à se les procurer, soit à cause des très-petites quantités qu’on en a.

Pour établir ce filtre, on introduit dans le tube d’un entonnoir de verre, du coton cardé, et on le tasse avec une baguette de verre, de manière à ce qu’il y forme une espèce de bouchon légèrement comprimé : on verse ensuite dans l’entonnoir le fluide qu’on veut filtrer, La filtration se fait goutte à goutte, et après avoir séparé les premières gouttes, celles qui suivent sont toujours claires. Les huiles essentielles peuvent très-bien être filtrées par ce moyen, sans craindre d’éprouver de déchet, lequel auroit nécessairement lieu si l’on se servoit des autres filtres dont on a déjà parlé.

Les acides, sur-tout ceux qui sont concentrés, ne peuvent être filtrés qu’à travers le verre pilé ; mais il faut avoir la précaution de n’employer ces substances qu’après les avoir fait laver à diverses reprises, d’abord avec beaucoup d’eau, et ensuite avec un acide, afin de les priver des matières terreuses que les acides qu’on voudroit filtrer pourroient dissoudre. Les filtres de verre peuvent très-bien s’établir dans un entonnoir : le grand art, pour qu’ils produisent leur effet, est de fixer d’abord dans le tube quelques fragmens de verre, et d’en ajouter ensuite d’autres plus petits ; on continue ainsi, toujours en diminuant la grosseur des fragmens, jusqu’à ce qu’on ait formé une épaisseur de trois ou quatre doigts, dont la dernière couche doit être de verre réduit en poudre fine. Cette espèce de filtre débite assez bien pour qu’en moins d’une heure il soit possible de filtrer dans un entonnoir de verre de moyenne grandeur plusieurs kilogrammes d’acides.

Le sable est aussi très-ordinairement employé pour clarifier l’eau qui sert dans l’intérieur de nos ménages. Les fontaines sablées sont en effet de vrais filtres, dont l’effet est d’autant plus sûr que les couches de sable se trouvent disposées de manière à ce que l’eau qui les recouvre soit obligée de les traverser successivement, et de manière à retenir les corps qui nuisent à sa transparence.

L’art de faire des fontaines sablées n’est pas encore au degré de perfection qu’il pourroit atteindre ; et quoique son objet paroisse de peu d’importance, il mériteroit bien de fixer l’attention des physiciens.

Au reste, l’expérience prouve que les fontaines sablées ne peuvent servir avec succès que pendant quelque temps ; souvent il faut renouveler le sable qu’elles contiennent, ou au moins le laver, pour le priver des substances terreuses et hétérogènes que l’eau y dépose, et qui, lorsqu’elles sont accumulées jusqu’à un certain point, s’opposent non seulement à la filtration, ou la rendent incomplète, mais communiquent encore au liquide un goût d’autant plus désagréable, qu’elles ont séjourné plus de temps.

Comme nous l’avons déjà fait remarquer, rien de plus aisé que de soustraire des eaux de rivières la terre qui les souille, en les laissant reposer quelques heures dans un vase de terre, mais à