Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 11.djvu/487

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convient singulièrement aux cochons, et aux vues qu’on a de les engraisser promptement et à peu de frais. On peut conduire ces animaux plusieurs jours de suite dans les champs où l’on a récolté cette plante ; en fouillant la terre, ils y trouvent les tubercules qui ont échappe aux ouvriers, et qui, sans cet emploi, seroient absolument perdus ; mais en soumettant ces pommes de terre au pressoir, comme les pommes à cidre, il en résulte un marc farineux qui, séché au soleil et mis en réserve, peut offrir, dans toutes les saisons, une excellente nourriture d’engrais.

La main-d’œuvre étant fort chère en Amérique, on a imaginé de simplifier plusieurs opérations rurales, lorsqu’il s’agit d’engraisser des cochons avec des pommes de terre ; comme tous les champs sont enfermés avec des palissades, il est aisé de leur donner la forme et la grandeur nécessaires. Ceux qui sont destinés à engraisser les cochons sont longs et étroits. Supposons-en un, par exemple, de huit perches de large, sur soixante de longueur ; ce champ est d’abord planté avec des pommes de terre en sillons distans les uns des autres de trois pieds ; quand, vers le mois de septembre, elles ont acquis leur maturité, on divise les champs avec des palissades à quatre perches de distance du commencement. On y met ensuite les cochons, ainsi que l’auge nécessaire pour les abreuver. Ces animaux, en fouillant, trouvent aisément le fruit qu’ils aiment, d’autant mieux qu’ils semblent le dérober. Quand cette première partie est épuisée, la division est replacée à trois ou quatre perches plus avant, et ainsi de suite ; d’où il résulte une épargne considérable de soins et de dépenses, en même temps que le terrain se trouve mieux préparé pour une autre culture.

Les carottes, la betterave champêtre, les topinambours et les panais, ne sont pas moins recherchés par les cochons que les pommes de terre ; ils les mangent avec la même avidité. Ces racines, à la vérité, ont trouvé, parmi les Anglais, quelques détracteurs ; ils ont prétendu, non pas qu’elles ne fussent propres à l’engrais de ces animaux, mais qu’elles étoient sans profit et sans valeur pour l’engrais ; mais Arthur Young a répondu par des faits à toutes les objections ; et, quoiqu’il regarde que les semences légumineuses sont à la valeur alimentaire des racines comme 42 est à 7, il ne cesse d’en recommander l’usage.

Il faut convenir que, si on veut conserver au lard son goût et sa fermeté, on doit l’empêcher de se dénaturer dans la cuisson, toujours ajouter au manger, quand il est composé de matières fluides et relâchantes, quelques substances astringentes, comme le tan, l’écorce de chêne, les fruits amers, acerbes, pour soutenir l’action de l’estomac et prévenir les flatuosités. C’est peut-être pour produire cet effet que, dans certaines contrées, l’habitude est de laisser dans l’auge du cochon, un boulet que d’autres remplacent par l’emploi d’un vase de fer, pour l’apprêt de la mangeaille.

Mais, nous ne saurions assez le répéter, quoique les racines soient toutes excellentes pour la nourriture des cochons, on ne parviendra jamais à les engraisser promptement et efficacement, qu’en les faisant cuire et les mêlant avec un peu de farine, des pains de suif, etc.

Huitième moyen d’engrais. Quoique tous les grains farineux soient, sans contredit, les matières les plus propres à concourir à l’engrais des animaux, puisqu’ils renferment le plus de nourriture sous un moindre volume, il a fallu choisir, parmi les céréales et les cérumineux, ceux qui sont les moins chers dans les cantons qu’on habite ; au Midi, c’est le maïs ; au Nord, c’est l’orge, les pois, les fèves et les haricots. Il ne faut pas les