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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 11.djvu/562

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Rouen sont, à notre connoissance, le seul canton de France où elle soit établie ; elle est plus commune en Allemagne. Le cresson de fontaine est cultivé en grand dans plusieurs endroits de ce pays, surtout aux environs d’Erfurd, de Francfort, etc. Nous allons exposer ici la méthode suivie en Allemagne, d’après ce que nous avons vu sur les lieux, et d’après les renseignemens que nous puisons dans les ouvrages allemands.

Le cresson est une plante aquatique qui ne parvient à une belle croissance que lorsqu’elle est suffisamment baignée par une eau vive et limpide. Il est donc nécessaire, pour établir une cressonnière, d’avoir un terrain avec des sources, ou de pouvoir y conduire facilement celles qui en sont éloignées. Ces conditions sont indispensables, lorsqu’il s’agit de cultiver le cresson en grand.

L’eau la plus favorable est celle où le cresson croît naturellement, et qui conserve en hiver assez de chaleur pour n’être pas sujette à geler à une certaine distance de sa source. Plus les eaux seront chaudes et abondantes, moins on aura à craindre l’effet des gelées. Les eaux dont le cours est lent et tranquille y sont plus exposées que celles qui coulent avec célérité. Les cressonnières doivent être établies dans le lieu le plus voisin de la source ; et, dans le cas où cette disposition ne seroit pas praticable, il sera avantageux de conduire l’eau par des canaux couverts, afin de conserver plus long-temps la chaleur qu’elle a en sortant de terre : car le cresson se maintient et végète durant l’hiver, à raison du degré de chaleur dont est chargée l’eau qui le baigne. Il est nécessaire que les fontaines servant à l’irrigation des cressonnières ne tarissent pas dans tout le courant de l’année ; le cresson viendroit mal, et donneroit de foibles récoltes, ou périroit s’il restoit à sec pendant quelque temps.

Les terrains marécageux où l’eau suinte de toute part, peuvent être employés à cette culture avec d’autant plus d’avantage, qu’ils sont impropres à toutes les autres, et que les plantes qu’ils produisent sont d’une trop mauvaise qualité pour servir d’aliment aux animaux. On doit aussi choisir de préférence des sols humides, sur-tout lorsqu’on n’aura pas une grande quantité d’eau à sa disposition. Les terres les plus médiocres seront bonnes pour cette culture ; on doit réserver les plus fécondes pour les autres produits de l’agriculture. Il ne faut cependant pas que le terrain soit uniquement composé de sable. Il sera nécessaire, dans ce cas, de répandre au fond des plates bandes ou canaux, dont nous parlerons plus bas, une couche de terre épaisse de six pouces. Cette superficie de bonne terre est nécessaire, afin que le cresson puisse implanter ses racines, et s’emparer des sucs propres à sa végétation.

Le terrain sur lequel on se propose de former une cressonnière ne doit pas avoir une trop grande inclinaison ; il seroit dans ce cas impossible ou trop dispendieux de lui donner le nivellement nécessaire au maintien des eaux. Il doit cependant avoir une pente légère, afin que ses eaux aient un certain écoulement, et qu’elles ne restent jamais en stagnation.

L’emplacement qu’on choisira sera à l’abri des inondations, de manière que les eaux de pluie provenant des champs voisins ne puissent s’y répandre et y apporter du limon, des sables, ou des graviers ; ce qui encombreroit les canaux, et feroit périr le cresson ; d’ailleurs, l’eau sale et fangeuse est nuisible à sa végétation. Si l’emplacement se trouve exposé aux inondations, on pratiquera, où il sera nécessaire, des canaux ou des digues pour arrêter les eaux, et les éconduire vers un autre point.

Il est bon de faire remarquer que l’établissement d’une cressonnière ne peut