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cule, ainsi que ses feuilles, et autres ordures qui surnagent après la coupe du cresson, sont conduites sur les bords des canaux, par le moyen d’un léger râteau à planche étroite ; on les prend ensuite à la main, et on les rejette au dehors. Si l’on arrache, par hasard, quelques pieds de cresson, on aura soin de fixer leurs racines, en les comprimant dans la vase avec l’extrémité du râteau.

Le cresson seroit sujet à geler pendant les fortes gelées de l’hiver, si l’on n’avoit soin de le rabattre, et de l’enfoncer sous l’eau. On se sert, pour cette opération, d’une planche percée de trous, et armée d’un manche long de trois mètres (dix pieds.) Elle doit être d’un bois qui se fende difficilement, tel que le hêtre, le chêne, etc. Sa longueur est de cinq décimètres ; (vingt pouces) sa largeur, de trois décimètres huit centimètres ; (quatorze pouces) son épaisseur, de deux centimètres (dix lignes.) Les trous doivent avoir trois centimètres (un pouce) de diamètre, et être distans les uns des autres de deux centimètres (dix lignes.) Le manche est posé à angle de quarante-cinq degrés, et fixé solidement sur la planche. Celle-ci est percée de trous, afin que l’eau puisse passer à travers, et offrir moins de résistance lorsqu’on presse le cresson.

Pour conserver le cresson dans toute sa fraîcheur, et empêcher qu’il ne soit endommagé par la gelée, il est nécessaire, aussi long-temps que le froid dure, de ne point laisser passer un jour sans le comprimer avec la planche, et le faire entrer sous l’eau. En général, le cresson prospère mieux lorsqu’on le tient, pendant l’hiver, au niveau des eaux, et qu’on ne lui permet pas de s’élever au dessus de leur surface.

Lorsque l’herbe des gazons placés entre les canaux et les plates-bandes est parvenue à une certaine longueur, on doit la couper, pour empêcher qu’elle ne retombe sur le cresson ; ce qui nuiroit à sa naissance, et faciliteroit un passage aux limaçons, et autres animaux destructeurs.

La récolte d’une cressonnière pourra s’effectuer un mois ou un mois et demi après qu’on aura terminé sa plantation. Sa végétation sera plus ou moins hâtive, à raison que l’eau employée aura un degré de chaleur plus ou moins fort, ou à raison de la température de l’atmosphère. Des coupes successives auront également lieu pendant tout le courant de l’année ; et elles pourront se renouveler d’autant plus fréquemment, que l’on répandra une plus grande quantité d’engrais. Le cresson demande à être coupé fréquemment. Si on le laisse parvenir à une trop grande élévation, il fleurit promptement, devient coriace, et ne peut être d’aucun usage dans les cuisines.

La coupe, ainsi que différens travaux d’une cressonnière, s’exécute par le moyen d’une planche que l’on pose transversalement d’un bord du canal à l’autre. Un ou deux ouvriers s’agenouillent sur la planche, coupent le cresson, et transportent la planche successivement d’un lieu à l’autre ; ils se servent, pour cette opération, de couteaux, de ciseaux, ou, ce qui vaut mieux, de faucilles ; ils posent le cresson sur la planche à mesure qu’ils le coupent, et le transportent ensuite sur le gazon, au bord du canal. C’est là où ils le disposent en bottes, et l’arrangent dans des paniers.

Lorsque la coupe se fait dans l’hiver, et que la gelée est forte, on met le cresson dans des baquets remplis d’eau, afin d’empêcher qu’il ne gèle ; on le presse, et on le recouvre avec un linge, ou avec de la paille. On le porte ainsi aux habitations ; on le retire de l’eau, et on le dépose dans un lieu où le froid ne puisse