Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 11.djvu/572

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navigation intérieure. Cette navigation est, pour l’agriculture comme pour le commerce, d’un tel intérêt, que tous les autres doivent lui céder ; et c’est pour cela même que nul dessèchement ne doit être entrepris (dans l’intérieur des départemens) sans l’intervention de la partie publique, sans le concours de l’administration.

Quant aux terres inondées près les côtes de la mer, il n’y a jamais de danger à en opérer le dessèchement, leurs eaux qui s’écoulent à la mer ne peuvent remonter, et sont inutiles aux terrains supérieurs qui doivent cependant toujours être prévenus des dessèchemens qu’on propose de faire. (Voyez Dessèchement, (Société de), Statut 2.)

Deuxième Question. Le dessèchement doit-il être entier, ou ne comprendre que partie du terrain ? C’est ici qu’il faut une grande connoissance du sol et l’habitude de ces sortes de travaux. Celui qui ne l’a pas doit consulter avant de rien entreprendre. Les cas varient à l’infini, suivant les dispositions locales. Je ne puis indiquer ici que les principales considérations.

1°. J’admets d’abord le cas où la partie publique juge que le dépôt des eaux est nécessaire à la navigation, aux irrigations, etc. ; on peut alors, sans en diminuer le volume, en limiter l’étendue ; on peut faire la part aux eaux, les resserrer par des chaussées ou digues, convertir un marais infect, partie en prairies fertiles, partie en étangs poissonneux. Ce travail est digne de l’industrie humaine, et toujours possible.

2°. Supposons maintenant que la partie publique (l’administration) n’eût point d’intérêt à opposer à un dessèchement, il faut encore examiner s’il est de l’intérêt du propriétaire qu’il soit entier ou partiel.

En effet, le plus grand avantage d’un dessèchement est de ménager les eaux, de manière à ce que le terrain puisse toujours être desséché ou arrosé à volonté. Et, pour cela, quand on ne peut prendre des eaux extérieures, il faut s’en réserver sur son propre domaine ; car les marais inondés sont des dépôts vaseux ou tourbeux faits par les eaux ; ils reposent toujours sur un fond de glaise, d’argile ou de tourbe, sans quoi les eaux pilleroient et disparoîtroient. Or, ces fonds argileux et vaseux redoutent la sécheresse ; ils se fendent en longues crevasses, tout se dessèche, tout brûle à leur surface ; les bestiaux mêmes craignent d’y poser le pied, et ne les parcourent pas sans danger. Il est donc bien important de se ménager des moyens d’irrigation, dût-on sacrifier une partie du terrain, pour faire un grand dépôt ou réservoir d’eau. C’est un conseil que je ne crains point de donner aux propriétaires, et dont ils ne se repentiront jamais. Il est d’autres circonstances où il faut sacrifier une partie du terrain, pour assurer les travaux d’un dessèchement. On le verra à l’article des travaux nécessaires aux dessèchemens.

Troisième Question. Faut-il opérer un dessèchement entier ou un demi-dessèchement ?

Ici, l’intérêt seul du propriétaire ou entrepreneur doit être consulté. Il faut calculer la dépense et le produit ; il faut sur-tout considérer les terrains environnans. Une promenade chez ses voisins est toujours utile au cultivateur qui sait bien observer, et qui veut entreprendre une exploitation rurale. En effet, s’il falloit dépenser beaucoup d’argent pour faire un dessèchement complet, recourir à des ouvrages d’art dispendieux, tandis que, par des travaux faciles, on se procureroit un demi-dessèchement et de bons pacages, si enfin ceux-ci donnent plus de revenu que des terres labourables, il est évident qu’il faudroit préférer les demi-dessèchemens, c’est-à-dire