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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 11.djvu/91

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Ces diverses opinions ont été rectifiées en 1792 par M. Huber de Genève, qui a observé et reconnu que la fécondation de la reine, ou abeille femelle, s’opère dans l’air, comme celle de la plupart des insectes qui appartiennent à cette classe.

Une des femelles nouvellement écloses quitte la ruche vers le sixième jour de sa naissance ; elle va à la rencontre d’un mâle ou faux bourdon, et la fécondation a lieu. Cette première sortie a-t-elle été sans succès, la reine va de nouveau chercher fortune les jours suivans ; et, une fois fécondée, elle l’est pour deux ans, peut-être même pour toute sa vie.

M. Huber, à qui l’on doit cette découverte, a remarqué que la mère abeille gardoit dans son corps les organes de la génération du mâle, et les rapportoit à la ruche, de manière que ce dernier périt peu de temps après l’accouplement, et que pour lui la mort devient le prix de l’instant rapide d’un plaisir fugitif, et de l’acte auquel la reine devra bientôt une population immense de nouveaux sujets.

Pendant six mois de l’année, les œufs que pond la femelle ne donnent que des mulets ou des abeilles ouvrières ; les mâles proviennent des œufs pondus à une autre époque, qui est ordinairement en juin.

Les progrès de développement de l’insecte parfait varient selon le sexe : les femelles peuvent voler le seizième jour après leur sortie de l’œuf, les mulets le vingtième jour, et les mâles le vingt-quatrième.

Il paroît que les abeilles ouvrières ou les neutres sont des femelles chez qui les organes de la génération ne sont pas développés. Cette observation, d’abord faite par M. Schirach, a été depuis confirmée par M. Huber, ou plutôt par François Burnens, son domestique.

On doit à cet homme intelligent, qui dirige son maître aveugle depuis sa jeunesse, une remarque non moins intéressante, c’est que la pâtée ou la bouillie administrée aux larves des femelles est différente de celle qui sert à la nourriture des autres larves ; en sorte que les larves des neutres, qui se trouvent dans des cellules voisines de celle d’une femelle, deviennent plus grosses et donnent des ouvrières qui pondent quelquefois des œufs d’où proviennent des mâles. M. Huber a plus fait encore ; il est parvenu à changer des larves de femelles en neutres, des larves de neutres en femelles. Une autre observation l’a d’ailleurs pleinement confirmé. Qu’un accident fasse en effet périr les larves des femelles, que l’on prive une ruche de la mère, et qu’on force les abeilles neutres à y rester, on a reconnu qu’alors celles-ci agrandissent les cellules de deux ou trois larves de mulets, qu’elles leur donnent l’aliment destiné à développer leur sexe, et qu’elles ne tardent pas à en voir sortir des femelles dont une est adoptée pour reine, les autres étant ou vouées à la mort, ou réservées pour être mises à la tête des essaims qui partiront.

Éducation Des Abeilles. Les soins que cette éducation exige, aussi agréables qu’utiles en eux-mêmes, ont le double objet de pourvoir aux besoins, à la conservation des abeilles, et de tirer de leur précieux travail le plus grand parti possible. L’intérêt même des cultivateurs les a ainsi portés à perfectionner les pratiques jusqu’ici usitées, et doit leur faire accueillir celles que l’expérience a fait connoître, comme offrant le plus de simplicité et d’avantages.

Formation d’abreuvoirs artificiels. Le voisinage de l’eau est absolument nécessaire aux abeilles ; le propriétaire qui les cultive et qui manque d’eau risqueroit donc de les perdre, s’il ne leur en fournissoit ; mais il faut encore qu’en leur en procurant il évite de les exposer à se noyer. M. Lombard, membre de la