Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/176

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ment à ce gibier, sont le rafle, et l’araignée, ou aragne. Il se prend aussi dans de grandes nappes tendues perpendiculairement et rasant terre comme des toiles, au moyen de perches verticales et de cordages. Ces nappes, qui ont jusqu’à soixante pieds de long sur quinze de hauteur, se placent au bord des bois et au passage des grives ; le plus qu’on peut en réunir bout à bout est le meilleur ; douze ou quinze, ainsi disposées, forment une ligne très-tendue ; plusieurs chasseurs partant de chaque bout de la ligne parcourent une enceinte proportionnée à leur nombre, et se rabattent, souvent de plus d’une demi-lieue, vers les filets où ils poussent doucement tout ce qu’ils ont traqué dans cette longue circonvallation. Par cette méthode, on détruit beaucoup de grives en Suisse.

Le rafle est un filet contre-maillé, qui ne diffère du tramail ou de la pantaine que par les proportions. Sa longueur est de douze à quinze pieds, et sa hauteur de huit à dix. Les aumées ou toiles extérieures sont à mailles carrées et de trois pouces d’ouverture ; le fil qu’on emploie est retors à trois brins. La nappe du milieu, ou toile proprement dite, est faite de fil plus fin, retors à deux brins seulement ; elle est de plus à mailles en losange et de neuf à dix lignes de large. Cette toile est à peu près double des aumées en longueur et hauteur, pour que, renfermée entr’elles, elle y puisse bourser et empêtrer le gibier qui s’engage à travers les aumées, et qui, en poussant sur la toile, y forme une poche dans laquelle il s’enveloppe lui-même. On a, pour tendre le rafle, deux perches légères excédant de deux ou trois pieds la hauteur du filet. Ces perches, attachées à chaque bout et le long de cette hauteur, comme on fait pour les traîneaux à cailles, sont portées par deux hommes qui, à leur moyen, gouvernent ce filet et le présentent dans la direction et à la hauteur convenables. La chasse au rafle se fait la nuit par un temps obscur et calme ; un peu de brouillard même y est très-favorable. Il faut se réunir au moins quatre. Deux, comme je viens de le dire, portent le filet, un troisième est muni d’une torche ; le quatrième traque et bat les haies et les buissons. Arrivés dans un endroit qu’ils savent fréquenté des grives, ainsi que des merles qui vont avec elles de compagnie, les chasseurs se disposent de la manière suivante : Les porteurs du filet se postent à un bout de la haie, ou à la tête des buissons, observant, s’il y a un peu de vent, de se placer de manière qu’ils l’aient à dos, parce que les oiseaux qui doivent venir à eux dorment toujours la tête au vent. Derrière eux et éloigné environ à vingt pas, se place le porte-torche. Partant de l’extrémité opposée de la haie, le traqueur la bat, ainsi que les buissons. Les oiseaux éveillés fuient, et la lumière de la torche, qu’ils prennent sans doute pour un rayon du jour, les détermine à se diriger de ce côté ; mais le perfide filet interposé au passage entre la haie et la torche, y termine et leur course et leur vie.

L’araignée, telle qu’elle est décrite dans la plupart des ouvrages qui traitent de la chasse aux oiseaux, n’est qu’une petite pantaine simple, à mailles en losange d’un pouce de large, faite d’un fil à deux brins, et montée sur une corde qui sert comme de tringle, au moyen de bouclettes, et mieux encore de petits anneaux qui glissent bien mieux. À chaque extrémité de cette corde-tringle étoit un petit bâton de quatre à cinq pouces et cunéiforme, qu’on appeloit triquet. Ces triquets enfonçoient légèrement sur eux branches d’arbres dans lesquelles on pratiquoit, sur les lieux mêmes, une entaille propre à recevoir