Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/181

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publique gagnera infiniment au remplacement de l’avoine par l’orge, et qu’une pareille révolution dans la manière de se nourrir deviendra pour la France une richesse incalculable. Quels que soient les efforts de l’industrie de ceux qui convertissent ce grain en farine et en pain, ils ne viendront jamais à bout d’affoiblir cette couleur foncée et cette amertume nauséabonde qui le caractérisent.

Ces mauvaises qualités, inhérentes à ce grain, sont reconnues depuis longtemps ; car les statuts de quelques ordres monastiques ordonnent le pain d’avoine par mortification ; et les anciens Romains en ont fait manger à leurs héros pour leur faire faire pénitence de leurs infidélités. Liébaut lui-même, un des auteurs de la Maison rustique, ne parle de ce pain que comme d’un aliment auquel on a recours en temps de famine.

Je ne puis quitter cet article sans élever la voix contre l’usage dans lequel sont les habitant de plusieurs cantons de la France, de faire consister leurs ressources alimentaires dans le pain d’avoine, et sur-tout quand je pense que ce pain, si peu substantiel, et d’un aspect révoltant, est encore plus cher aux malheureux qui s’en nourrissent, que celui de froment le mieux fabriqué. La plume tombe des mains en réfléchissant sur le coupable aveuglement où l’on est plongé à cet égard. L’homme seroit infiniment moins à plaindre, s’il n’avoit que les fléaux de la nature à redouter.

Les frais pour concilier à l’orge l’état d’orge mondé, ne sauroient excéder ceux que demande la mouture ordinaire de ce grain converti en farine : le déchet, à la vérité, sera plus considérable, à cause des portions de farine qui se trouveront nécessairement confondues dans le son : mais cette perte n’est qu’apparente ; car elle devient une ressource pour la nourriture et l’engrais des bestiaux.

Une autre circonstance sur laquelle je ne saurois trop insister, c’est de ne jamais brusquer la cuisson des farineux réduits à l’état de gruau, parce qu’alors ils absorbent moins d’eau ; elle ne s’y combine pas de la même manière ; et le mélange conserve le caractère d’une matière pultacée, collante, visqueuse, comparable à cet aliment si usité qu’on prépare avec le froment, et connu sous les noms de bouillie en France, et de polenta au midi de l’Europe. (Parmentier.)


GUIDEAU, (Pêche.) L’on se sert rarement du guideau dans les rivières, et son usage devroit être interdit, même dans celles qui sont les plus poissonneuses. Les verveux sont employés plus généralement, et sont préférables en ce qu’ils ne nuisent pas autant à la multiplication et au commerce des poissons, en arrêtant et détruisant les plus petits, et en rendant les gros qui s’y prennent hors d’état d’être conservés ou transportés, parce qu’ils y meurent presque tous avant d’en être retirés.

Le guideau est un filet allongé en forme de chausse, dont l’embouchure, qui est fort évasée et tenue ouverte soit par un châssis d’assemblage, soit par des cerceaux, soit par un goulet, se présente à un courant qui la traverse. Les poissons entrent dans cette longue chausse et se pressent au fond, d’où il est rare qu’on les retire en vie ; les plus petits, froissés par les gros, poussés eux-mêmes par le courant, y sont quelquefois réduits en bouillie. Pour ôter ces poissons de la queue du boyau où ils s’amoncèlent, on délie une corde qui la tient fermée, ou bien on détache un panier d’osier qu’on