Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/275

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fait des difficultés pour se laisser téter. Le berger doit le tenir au commencement, afin d’empêcher qu’elle ne repousse l’agneau les premières fois qu’il veut téter. Cette méthode est en usage parmi les bergers espagnols.

Lorsqu’on sèvre les agneaux, on doit leur donner une nourriture substantielle, et leur réserver les meilleurs pâturages. Il importe beaucoup de les bien nourrir dans leur jeunesse, si l’on veut fortifier leur constitution, et les mettre à l’abri des maladies qui dévastent trop communément nos bergeries. C’est par le défaut de nourriture dans les premières années, que souvent les races s’affoiblissent et dégénèrent. Les bergers espagnols ont soin de placer les agneaux sur les meilleurs pâturages ; ils réservent sur-tout les herbages les plus succulens pour les agneaux tardifs, afin que ces animaux délicats puissent croître et se fortifier avant la mauvaise saison.

§. XIV. De l’amputation des cornes, et de la castration. On doit couper aux agneaux la queue et les cornes. Ces deux opérations se font dans la belle saison, lorsque les animaux ont trois ou quatre mois. Il suffit de laisser à la queue une longueur de quatre à cinq pouces. Les Espagnols coupent les cornes à sept ou huit doigts de leur origine, en se servant d’un instrument tranchant, ou d’une scie ; cette dernière méthode est préférable. On coupe les cornes de nouveau, lorsqu’elles repoussent, et qu’elles se dirigent vers la tête de l’animal de manière à le blesser.

Plusieurs cultivateurs français préfèrent de laisser croître les cornes. On a exposé, dans le cours de cet Ouvrage, les raisons qui doivent engager à les amputer. C’est un vain ornement qui n’a aucune utilité pour l’animal, et qui souvent peut lui être funeste. C’est pour cette raison que, toutes choses égales d’ailleurs, on doit préférer les races sans cornes.

Il arrive quelquefois qu’il naît dans les troupeaux des agneaux à laine noire ou tachetée, quoique le père et la mère portent une toison entièrement blanche. Cet accident, qui peut être l’effet d’un jeu de la nature, provient souvent de ce qu’il y a eu dans les générations antérieures un mélange de quelque individu à toison noire. On doit châtrer ces animaux, puisque leur laine a moins de valeur dans le commerce, et que les draps noirs qui en sont fabriqués perdent leur couleur, et deviennent d’une teinte roussâtre, désagréable à la vue.

§. XV. Des pâturages et des alimens propres aux moutons. Nous avons peu de chose à dire ici sur ce qui concerne le régime, la nourriture, les pâturages, qu’on doit donner aux bêtes à laine. Ces objets ont été traités en détail à l’article Mouton.

Il sera nécessaire d’avoir des pâturages ou des prairies artificielles situées sur des terrains secs et élevés, afin d’y conduire les bêtes à laine aux époques de l’année où l’air et le sol se trouvent chargés d’une grande humidité. On divise par portions, avec des claies ou avec des barrières, les prairies artificielles qu’on destine aux troupeaux. On les fait passer successivement d’une portion à l’autre, ayant soin de ne les laisser que peu de temps dans les divisions où les plantes sont parvenues à une certaine élévation ; on les conduit de là à une autre division dont l’herbe est courte ; les animaux trouvent, par cette disposition, la quantité d’alimens qui leur est nécessaire ; et l’on ne craint point qu’ils soient incommodés, ainsi qu’il arriveroit, si on les faisoit paître dans des herbages trop forts et trop succulens, sur-tout lorsqu’ils n’en ont pas contracté l’habitude. Si l’on a un nombre de chiens proportionné à celui des moutons, on pourra se dispenser de former des divisions ; un berger surveillant, avec le secours de quelques chiens