Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/321

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aux haras, autant d’onéreux pour le trésor public.

La multiplication, chez nous, diminuera chaque jour le nombre des chevaux étrangers qui nous auroient été nécessaires ; et bientôt nous parviendrions à suffire à nos besoins par nos propres ressources.

Il faut venir au point d’acheter, par degrés, pour les remontes, les chevaux en France ; on les paiera d’autant plus cher qu’il y en aura moins d’abord ; mais ce sera une raison pour qu’ils deviennent plus nombreux, et le prix modéré sera le résultat des encouragemens et de la perfection de notre industrie.

Cependant si nous permettions simplement l’importation chez nous, nos rivaux ne manqueroient pas, sans doute, de continuer à nous vendre leurs animaux, dussent-ils perdre, pendant quelque temps, sur le prix de l’achat ou de l’éducation ; leur commerce général finiroit encore par gagner, si ce sacrifice momentané avoit pour résultat de diminuer le zèle chez nous, pendant que cette opération l’exciteroit chez eux. Il faut prendre des moyens pour que l’étranger ne conserve pas ainsi son empire : ce qui feroit que nos citoyens resteroient chargés de leurs productions, la demande ne s’en faisant pas ou étant trop basse ; ce qui décourageroit le commerce des animaux, et la partie de l’agriculture qui leur est relative.

Il faudroit, pour s’opposer à ces inconvéniens, établir une autre base pour les droits des douanes ; au lieu de les percevoir, d’après la déclaration des valeurs, déclaration toujours peu sincère, on pourroit faire un terme moyen des valeurs de tous les chevaux étrangers, les plus beaux, et faire payer les droits par chaque cheval, en raison de ce terme moyen.

Les montures mêmes et les chevaux de voitures qui entrent en France, seroient soumis à ce même droit, qui augmenteroit en proportion de l’élévation du prix des chevaux français : le taux en seroit toujours tellement calculé, qu’en supposant des qualités égales, le cheval français se trouvât le moins cher. Le gouvernement pourroit se faire rendre un compte fréquent du prix des chevaux français et de celui des chevaux étrangers, de manière à maintenir toujours la balance en équilibre.

Quand le goût et le commerce auroient produit tous leurs bons effets chez nous, ils ne manqueroient pas d’étendre leur influence chez l’étranger ; alors il pourroit nous être donné de nous livrer à notre tour à un commerce d’exportation, et nous verrions enfin pencher la balance à notre avantage.

Mais, qu’on ne s’y méprenne pas, quand nos approvisionnemens en étalons et jumens, pour les haras publics ou particuliers, seront faits, l’exportation ne pourra que nous être favorable ; elle fera donner à nos chevaux de la considération, du prix chez l’étranger, et ne manquera pas d’exciter le zèle chez nous, et d’y apporter la richesse. Mais, dira-ton, l’étranger, avec des souches, multipliera nos races chez lui, et les chevaux nés en France cesseront de lui être nécessaires. Au contraire, il est constant que le nouveau climat modifiera, altérera les formes ; et si nos vœux étoient remplis, on n’exporteroit le plus souvent que des chevaux bien dressés au manège, de sorte que nous aurions moins à craindre que l’étranger n’en produisît de pareils.

§. II. L’amélioration et la multiplication des chevaux sont désirables, relativement à l’agriculture ainsi qu’au commerce. Le cheval est aujourd’hui le principal aide de l’homme dans les travaux de l’agriculture ; les bœufs n’y sont plus employés que dans les pays où l’on en élevé, ou dans ceux qui en