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la tige principale. Les pépiniéristes influent rarement sur leurs productions ; mais ils le peuvent cependant, en blessant les racines, pour y développer, par l’interception de la sève, la formation d’un bourrelet d’où sortira un bourgeon. On se borne ordinairement à arracher ces rejetons tous les hivers, pour les planter séparément, et en faire de nouveaux pieds dont la culture se confond avec celle des plantes analogues.

Il n’en est pas de même des marcottes ; elles sont presque toujours dues à l’art, et elles forment un article important dans le travail d’un pépiniériste qui cultive des arbres ou arbustes d’agrément. Leur théorie consiste à déterminer une branche, en la mettant en terre, à pousser des racines et à servir ainsi de type à un nouvel individu de son espèce.

On compte trois différentes manières de marcotter, qui ont toutes leurs avantages et leurs inconvéniens, et qui sont applicables chacune à quelques espèces d’arbres plutôt qu’à d’autres.

1*. En bute. Elle consiste à couper un arbre rez terre, et lorsque la cépée est formée, c’est-à-dire au bout d’un an, couvrir la base des jeunes pousses qui la forment avec une terre assez dure, pour qu’elle conserve la forme pyramidale et l’humidité nécessaire.

On emploie rarement ce mode de marcottage dans les pépinières bien montées, parce qu’on n’est jamais certain qu’il produise son effet, à raison de la direction qu’on laisse aux jeunes pousses, et de ce que les espèces auxquelles on peut l’appliquer se soumettent également au suivant.

2°. En recouchage. Elle consiste à coucher en terre et à y assujettir par le moyen d’un crochet ou d’un corps lourd, soit les jeunes pousses d’un arbre recépé, soit les branches inférieures d’un arbuste, soit même toutes celles de celui qui est planté dans un pot et qu’on a inclinées suffisamment pour cela. Ce genre de marcottage est le plus généralement usité et le plus avantageux sous tous les rapports. On le fait ordinairement pendant l’hiver ; mais on peut le pratiquer, sans inconvénient, pour la plupart des arbres et arbustes, pendant presque toute l’année. Il demande des modifications dans certains cas. Ainsi il est quelquefois utile de contourner légèrement sur elle-même la branche qu’on y soumet, ou de la casser à moitié ; d’autres fois, de faire une ligature avec un fil de laiton ou une incision à l’écorce pour déterminer la formation d’un bourrelet, et, par suite la plus prompte sortie des suçoirs qui doivent fournir des racines.

Les marcottes de cette sorte doivent être assez enfoncées en terre, pour qu’elles se trouvent constamment entourées d’humidité ; mais la crainte de casser les branches avec lesquelles on les fait ne permet pas toujours de les voir arriver au point désirable. Dans ce cas, on opère en plusieurs temps. Par exemple, on met sur une branche une pierre du poids de deux livres, qui la tient parallèle au sol ; huit jours après, ou fait une excavation à la terre et on la charge d’un poids de quatre livres, et enfin on parvient à la fixer au fond de cette excavation. Il faut, par la raison ci-dessus énoncée, arroser les marcottes pendant les grandes chaleurs de l’été, et tenir toujours la terre meuble autour d’elles. Les branches de quelques espèces d’arbres et d’arbustes prennent ainsi racine en deux ou trois mois ; mais à la plupart il faut un an, et à quelques unes deux ou même trois ans, et beaucoup ne se prêtent pas à ce genre de multiplication, par des causes de différentes natures qu’il seroit trop long de détailler ici.

Lorsqu’on s’est assuré, par l’inspection, qu’une marcotte a jeté assez de racines pour pouvoir vivre par ses propres moyens, on la sépare de sa mère et on la plante autre part. Beaucoup de pépiniéristes mettent de l’intervalle entre l’époque de la séparation qu’on appelle le sevrage, et celle de l’arrachage, et, en général, ils sont dans le cas d’être imités, car ils suivent rigoureusement les principes de la saine physique ; mais, comme l’économie de temps doit aussi entrer en considération, on ne peut regarder ce retard comme très nécessaire, que lorsque les marcottes sont précieuses, ou qu’on s’est assuré qu’elles ne sont pas pourvues d’assez de racines.

3°. En pots en l’air. Il est des arbres dont les branches sont trop élevées pour être ramenées en terre, ou des arbustes trop précieux pour qu’on ose se permettre d’en altérer la forme par le marcottage ordinaire, et, pour les multiplier, on est obligé de pratiquer cette manière de marcotter qui se subdivise en deux, à raison de la position de la marcotte.

La première manière consiste à attacher un pot à une des grosses branches, d’un arbre ou à un pieu planté près de lui, et à plier un des rameaux du même arbre dans la terre de ce pot, où on l’assujettit avec un crochet ou avec un poids.

La seconde manière s’exécute en faisant passer la branche ou le rameau dans un trou