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LE MARTYRE

grand de vos dieux, c’est votre ventre ; vous lui sacrifiez la plus noble partie de vous-même ; et vous rabaissant jusqu’à la nature des bêtes, après avoir vécu comme elles, vous n’attendez qu’une fin pareille à la leur. Mais lorsque nous périssons par vos ordres, que font vos tourmens, sinon de nous faire passer du temps à l’éternité, et des misères d’une vie mortelle au bonheur d’une vie qui n’est plus sujette à la mort ?

Le gouverneur ne put refuser son admiration à un discours si rempli de sagesse et de générosité, il en fut touché : mais ce sentiment ne dura pas long-temps, et la honte, le dépit et la rage lui succédèrent bientôt, avec toutes les horreurs qui les accompagnent. Ne pouvant donc résister à ces trois furies, il commanda qu’on frappât à coups de poing cette bouche qui avoit parlé avec tant d’éloquence. La douleur que ressentit le S. Martyr ne fit qu’affermir sa constance ; et malgré le sang qui sortoit de sa bouche avec une partie de ses dents, il ne laissa pas de proférer ces paroles : Je confesse que Jésus-Christ est un seul Dieu, avec le Père et le Saint-Esprit, il est juste que je lui rende une âme qui est sortie de ses mains, et qu’il a rachetée de son sang. Ainsi la vie ne m’est point ôtée, elle n’est que changée en une plus heureuse ; et il m’importe peu de quelle manière ce corps cesse de vivre, pourvu que l’esprit qui l’anime retourne à celui qui lui a donné l’être. À peine S. Epipode