Page:Ruskin et la religion de la beauté.djvu/145

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ments du même ordre et mieux liés, et chez Michelet des images semblables et mieux suivies. Stendhal a la psychologie, Topffer l’humour, Fromentin la technique, Winckelmann la dialectique, Th. Gautier la couleur, Reynolds la pédagogie, Taine la généralisation, Charles Blanc le répertoire : Ruskin a l’amour. D’un bout à l’autre, ses livres sont traversés par un souffle d’enthousiasme ou de colère : les raisonnements que nous avons dits y circulent, mais comme moyens de propagande ; les images que nous avons vues y apparaissent, mais comme pièces à conviction. Si les unes et les autres sont chaotiques, c’est que la main du défenseur a tremblé d’émotion en les faisant passer sous les yeux des juges, les lecteurs. Pris séparément, ces morceaux ne l’emportent pas sur tant d’autres de nos écrivains, mais assemblés et mis en mouvement par la passion du lutteur, ils emportent tout avec eux. L’amour est le cinématographe qui leur redonne la vie.

C’est lui aussi qui, pénétrant tous les détails d’une tendresse quasi virgilienne, efface les rides de l’érudit et corrige les poses du virtuose. Pourquoi ces trente pages sur les nuages, sur leur équilibre et leurs projections d’ombres, et sur leurs formes géométriques et leurs flocons et leurs chariots ? Parce qu’il faut montrer que Turner, qu’on