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Page:Ruskin et la religion de la beauté.djvu/154

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didactiquement représenté, en pendant, par la méchanceté suivant sa route vers son misérable home. Ouvrier et pétroleuse, faits enfin prisonniers, jetant un regard effaré en cheminant vers la mort…

Hélas ! de ces races divisées, dont l’une devait enseigner et guider l’autre, laquelle a péché le plus ? Ceux qui n’enseignèrent pas ou ceux qui ne furent pas enseignés ? Lesquels furent les plus coupables ? Ceux qui meurent maintenant, ou ceux qui oublient ?

Ouvrier et pétroleuse : ils ont passé leur chemin, — vers la mort. Mais pour eux, la Vierge de France déploiera encore son oriflamme sur leur tombe et posera ses lys blancs sur leur poussière souillée. Oui, et pour eux, le grand Charles éveillera son Roland et lui ordonnera de placer son fantomal oliphant à sa bouche et de souffler un air de guerre, — et la Pucelle armée répondra avec une note des bois de Domremy, — oui et pour eux le Louis qu’ils ont raillé fera comme son Maître : il lèvera ses mains saintes et implorera la paix de Dieu !


Close ainsi, l’analyse d’une œuvre d’art n’a pas desséché le cœur ; l’étude des impressions ressenties, la culture du « moi » n’a fait que le rendre plus bienfaisant aux plaintes humaines, de même qu’on ne cultive l’arbre que pour qu’il répande autour de lui plus de fruit. Comme cette analyse de la nature, comme cette analyse de l’art, celle de l’esprit humain se réchauffe chez Ruskin d’un rayon de tendresse. Cette tendresse est la même en face de l’âme d’un jeune soldat, lorsque c’est elle qu’il examine, dans sa conférence à Woolwich,