troubler sa sérénité. Dans toutes ses paroles, il est l’homme qui de l’hôtel Danieli, à Venise, écrivait ces mots dans Fors Clavigera :
Voici une petite coquille de bucarde grise posée devant moi, que j’ai ramassée l’autre jour dans la poussière de l’île Santa-Helena et une coquille de limaçon brillamment tachetée, tirée des sables arides du Lido, et je voudrais me mettre à les dessiner et à les décrire en paix. Oui, et tous mes amis me disent que c’est là mon affaire. Pourquoi ne puis-je penser à cela et être heureux ? Mais hélas ! mes prudents amis, trop peu de toutes les choses auxquelles j’ai à penser me sont permises, car ce flot verdâtre qui passe en tourbillonnant devant mon seuil est plein de cadavres qui flottent et je dois laisser mon dîner pour les ensevelir, puisque je n’ai pu les sauver et mettre mon coquillage à mon chapeau et prendre mon bourdon à la main pour chercher quelque rivage qui ne soit pas encombré encore !
Il y a vingt et un ans que ces paroles furent écrites. Aux dilettantes qui voyageaient, cet hiver-là, en Italie, elles eussent semblé incompréhensibles. On les comprend maintenant, ou du moins, on devine leur sens douloureux et profond. On ne s’étonne plus de voir un touriste prendre garde aux êtres vivants et souffrants des pays qu’il traverse autant qu’aux pierres des monuments. Et s’il ajoute que « c’est la plus vaine des affectations que d’essayer de mettre de la beauté dans des ombres, tandis que toutes les choses réelles qui