Page:Ruskin et la religion de la beauté.djvu/199

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les choses nécessaires à notre être et par conséquent, dès que ces choses sont trouvées, dès que la fonction physiologique est remplie, ces plaisirs doivent avoir une fin, et si on les prolonge, ce ne peut être qu’artificiellement et sous une haute pénalité. » De même qu’il est très nécessaire de manger pour vivre, il devient très dangereux de vivre pour manger. « Au contraire, les plaisirs de la vue nous sont donnés comme des présents. Ils ne répondent à aucune nécessité de la simple existence. La distinction de tout ce qui nous est utile ou nuisible pourrait être faite et est souvent faite par l’œil sans qu’il reçoive le plus léger plaisir visuel. Nous aurions pu apprendre à distinguer les fruits et la graine des fleurs sans éprouver aucun plaisir supérieur à leur aspect. — Et comme ces plaisirs n’ont pas de fonctions à remplir, il n’y a pas de limites à leur durée, dans l’accomplissement de leur fin, car ils existent en eux-mêmes et ainsi peuvent être perpétuels avec chacun de nous, la répétition ne détruisant nullement leur charme, mais l’augmentant au contraire. Ici donc, nous trouvons une base très suffisante pour une estimation supérieure de ces plaisirs, d’abord en ce qu’ils sont éternels et inépuisables et secondement en ce qu’ils sont non des instruments de la vie, mais un objet de la vie. Or, en tout ce qui est objet de la