Page:Ruskin et la religion de la beauté.djvu/215

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peut-être la plus vraie mort ou défaiseuse de toutes les choses et même des pierres. »

Or ce pouvoir est celui d’un Artiste ; nous ne pouvons nous y tromper. « Je puis positivement vous assurer que, dans mon pauvre domaine d’art imitatif, toutes les forces mécaniques ou gazeuses du monde, ni toutes les lois de l’univers ne vous rendront capables de voir une couleur ou de dessiner une ligne, sans cette force singulière, anciennement appelée âme, » Car le pouvoir du hasard est très grand, mais il n’est pas artistique, et si nous pouvons, à la rigueur, imaginer une horloge sans horloger, il nous est très difficile de considérer un tableau de maître et de nier, de prime abord, qu’il y ait un Maître. Les savants, eux, sont fort à leur aise devant ce problème : ils ne voient pas le tableau. Plus ils raisonnent sur le côté esthétique de la nature, plus ils démontrent par leurs raisonnements mêmes qu’ils ne l’ont pas aperçu. Lorsqu’ils prétendent expliquer le Beau par l’Utile, « ils ne peuvent, dans leur extraordinaire orgueil, être comparés qu’à des vers de bois, fourvoyés dans le panneau d’un tableau fait par quelque grand peintre. Ils dégustent le bois en connaisseurs, mais arrivés à la couleur, ils lui trouvent mauvais goût, déclarant que même cette combinaison qu’ils n’ont pas cherchée ni désirée, est le