Page:Russell - Le Mysticisme et la Logique.djvu/83

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

toire, mais est un système de parties qui se déterminent entre elles[1] » — Voilà une affirmation qui passerait inaperçue, comme un vulgaire truisme. Je crois cependant qu’elle révèle une incapacité de comprendre entièrement la « révolution copernicienne » ; et que l’unité apparente du monde n’est que l’unité de ce que peut voir un sujet unique, ou appréhender, un esprit unique. La philosophie critique, quoiqu’elle se soit plue à insister sur l’élément subjectif d’un grand nombre de prétendus principes de la nature, a fini cependant, à force de considérer le monde comme inconnaissable, par attirer l’attention sur la représentation subjective, au point que l’on en arrive à oublier cette subjectivité elle-même. Après avoir reconnu que les catégories sont l’œuvre de l’esprit, elle en a été, elle-même, paralysée au point de renoncer à lever le voile de la déformation subjective. Sans doute, ce découragement était-il, en partie, bien fondé ; mais pas, à mon avis, de façon absolue et définitive. Il y avait moins de raison encore pour s’en réjouir ou pour supposer que l’agnosticisme qu’il aurait pu faire naître pût légitimement être remplacé par un dogmatisme métaphysique.

  1. Bosanquet, Logic II, p. 211.