Page:Russell - Le Mysticisme et la Logique.djvu/89

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« Avant de poursuivre l’interprétation rationnelle de l’Évolution, il est nécessaire de reconnaître, non seulement que la Matière est indestructible et que le Mouvement est continu, mais aussi, que la force persiste. Toute tentative de recherche des causes de l’Évolution serait manifestement absurde, si l’agent de la métamorphose, en général et en détail, pouvait, soit commencer à exister, soit cesser d’exister. La succession des phénomènes serait en ce cas entièrement arbitraire, et la Science déductive serait impossible. »


Cet alinéa montre de quelle façon un philosophe peut être tenté de donner une apparence absolue et nécessaire à des généralisations empiriques dont la vérité, seulement approchée, n’est garantie que par les seules méthodes de la science. On a dit très souvent que la persistance de quelque chose est une supposition préalable, nécessaire à toute recherche scientifique, et on soutient alors que cette présupposition s’applique à une quantité quelconque que la physique déclare constante. Il y a là, à mon avis, trois erreurs distinctes. D’abord l’étude scientifique et détaillée de la nature ne présuppose aucune de ces lois qui se trouvent être vérifiées par ses résultats. En dehors des observations particulières, la science ne présuppose rien, sinon les principes généraux de la logique, et ces principes ne sont pas des lois de la nature ; ils sont simplement hypothétiques et ne s’appliquent pas qu’à notre monde, mais